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Interview Dee Nasty (1995)

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Dee Nasty, Lionel D, Mr Freeze, Zekri

Je trouve encore qu’il y a un manque de solidarité entre les groupes. Chacun est jaloux de l’autre en croyant que l’autre fait mieux.

Alors que nous venons d’interviewer à nouveau Dee Nasty, nous avons fait le choix de publier en premier l’interview que nous avions réalisé il y a 20 ans, en 1995. Pour l’interview récente, il faudra patienter jusqu’à 16 heures. Début des années 1990, nous sommes au cœur même de ce qu’était cette culture. Le travail que nous avons mené durant cette période d’effervescence, ou d’âge d’or (au choix), nous a permis de constituer les rares témoignages de l’intérieur sur cette époque. Des groupes emblématiques comme La Cliqua ou Expression Direkt donnaient chez nous leurs premières interviews. Bien que d’autres comme Dee Nasty ou Sulee B faisaient déjà figures « d’anciens », ils avaient également toute leur place dans nos colonnes. Et même en couverture puisque c’est notamment au regard de sa forte implication dans l’émergence du hip hop que nous avions consacré à Dee Nasty celle de notre numéro 5. Dans cette interview réalisée il y a 20 ans, vous y (re)découvrirez les réflexions que nous nous faisions sur la tournure musicale du rap : celle d’accepter ou non l’intrusion des musiciens… On était finalement loin de la réalité et des problématiques qui se sont emparés de cette musique en France. Avec la même volonté qui nous animait, nous accompagnerons cette parution par une interview « vingt ans après » (disponible ici). Celle-ci vous permettra de mettre en contradiction les projections de l’avenir avec ce qui s’est réellement passé…

Down With This : Qu’as tu voulu exprimer en mettant énormément le scratch en avant dans ton nouvel album ?
Dee Nasty : On n’en entendait plus assez. Je voulais montrer qu’on peut faire des morceaux hip hop sans rapper.

DWT : Ne crois-tu pas que si cette discipline se fait rare, c’est parce qu’elle coûte très chère à pratiquer et qu’il faut se battre pour pouvoir se procurer du vinyl ?
Dee Nasty : C’est le problème depuis le début, c’est d’ailleurs pour ça qu’il n’y en n’a pas assez par rapport aux rappeurs. C’est vrai qu’en France, les platines et les disques sont chers. Aux Etats-Unis, une MK2 vaut 1200 francs alors qu’ici c’est 3500. Mais quand tu veux être guitariste, tu achèteras par exemple une Gibson qui vaut 5000 francs pour pouvoir bien faire les choses. Donc, comparativement, je ne trouve pas que c’est un instrument plus cher que les autres.

DWT : Est-ce que l’on doit prendre le morceau «Le Mouvement» comme un sentiment de nostalgie de ta part ou comme un constat sur les années passées de rap en France ?
Dee Nasty : Ça a bien évolué depuis que j’ai écris ce morceau, car j’avais l’impression qu’il y avait une conspiration. Il n’y avait pas encore ce renouveau (compil de Moda et Dan, arrivée de La Cliqua, nouvel album d’IAM…). Mais tout n’est pas aussi rose que ça. Je trouve encore qu’il y a un manque de solidarité entre les groupes. Chacun est jaloux de l’autre en croyant que l’autre fait mieux. Il y a trop de gens qui sont là depuis longtemps, qui sont dégoûtés de voir d’autres personnes qui débarquent et pour qui ça va très vite. Ce n’est en fait qu’une impression. Rien que les médias créent eux-mêmes de la jalousie en présentant un groupe comme le «super-méga» groupe, ne serait-ce que pour monter le journal. C’est d’ailleurs pour ça que je disais que j’en avais marre que l’on me cite comme le «parrain», ce terme que les médias reprennent les uns aux autres. Même si c’est un rôle enviable, important ou ce qu’on veut, la manière dont c’est traité, ça devient débile. C’est comme si je voulais faire de l’ombre à d’autres, alors que ce n’est pas le cas. C’est comme s’ils me présentaient comme le seul depuis 1984, alors qu’il n’y avait pas que moi.

Il y a trop de gens qui sont là depuis longtemps, qui sont dégoûtés de voir d’autres personnes qui débarquent et pour qui ça va très vite.

DWT : Que penses-tu des groupes qui commencent à s’auto-produire alors que tu as eu une expérience similaire il y a déjà plus d’une décennie, en 1984 ?
Dee Nasty : En 1989, les majors se sont mis à signer à tout va. A l’époque, c’était un chemin de galérien que de s’auto-produire quand on savait qu’on pouvait sortir des disques en pensant qu’on toucherait des millions. Donc personne ne pensait à s’auto-produire. Depuis un certain temps, tout le monde se met à faire son business tout seul. Du coup, tu t’aperçois vraiment ce qu’il se passe et ça te remet les pieds sur terre. En ce qui me concerne, je veux créer un label qui reste à certain niveau et qui soit à une échelle humaine. Il ne faut pas que se soit la course au succès ou à l’argent. Quand tu sors en auto-production, ce qui est dommage, c’est que les gens qui écoutent ton disque vont le critiquer comme s’ils critiquaient un disque sorti sur une grosse major, avec un très gros budget. Dans mon label, il n’y aura pas que mes productions car il sera ouvert à tous. Quoiqu’il en soit, mon troisième album me permettra aussi d’inviter d’autres gens pour les faire découvrir. Même si ça ne fait pas de grosses ventes, ces disques existeront.

Quand tu sors en auto-production, ce qui est dommage, c’est que les gens qui écoutent ton disque vont le critiquer comme s’ils critiquaient un disque sorti sur une grosse major, avec un très gros budget.

DWT : La Zulu Nation tient-elle toujours une place importante dans ton travail ?
Dee Nasty : Pour moi, les principes de la Zulu Nation sont liés au hip hop lui-même. Le hip hop n’aurait pas eu une dimension autre que musical s’il n’y avait pas eu la Zulu Nation. C’est d’ailleurs par Bambataa que le hip-hop est arrivé en France, et même dans le monde entier. C’était le premier à voyager et à transmettre ça. Si tu es un vrai hip hoper, tu vis tous les préceptes de la Zulu Nation. Pour ce qui est des religions, c’était durant la période où il y avait un phénomène de mode mais toutes les religions sont acceptées. En ce qui nous concerne, nous sommes en train de faire un plan de relance et de réorganisation avec Nicky (Princes du Swing) et LBR. Nous allons aussi élire de nouveaux rois. Mais attention, être roi ce n’est pas juste avoir une couronne et des droits. D’ailleurs, la seule différence entre un Zulu et un Zulu King, c’est que tu agis pour faire évoluer les choses. Le côté officiel des choses, c’est que pour être membre, tu dois remplir un questionnaire, qui pour un fan de hip hop ne pose pas de problème. En contrepartie, on t’écris quand il se passe quelque chose, t’es donc au courant de tout. Il ne faut pas croire que la Zulu Nation c’est «papa et maman». On va apporter une nouvelle structure et informer sur les lois en les rendant moins dictatrices. Par exemple, pour les lois sur la drogue, il n’était pas précisé drogue «dur» ou «douce». A la limite, même si la nouvelle école ne connaît pas les principes de la Zulu Nation, elle en fait partie de fait, sans le savoir, car ça se rejoint.

DWT : Par ta qualité de DJ, que penses-tu des groupes de rap qui intègrent des musiciens dans leur morceau ou sur scène ?
Dee Nasty : Je trouve que le public qui aime le vrai rap, aime voir du vrai rap. Le public n’en a rien à péter qu’il y ait un bassiste ou un batteur. C’est quand même bien de faire ça, mais à ce moment-là t’en reviens à faire du funk avec quelqu’un qui rappe dessus. Tu perds donc ce truc hip hop. Et à l’inverse, quand un groupe de musiciens prend un DJ, il sera juste pris pour faire de la « percu-scratch ».

Je ne trouve pas que le futur du rap doit être comme ça. Ils trouvent comme prétexte que ça fait dix ans que c’est comme ça et qu’il faut évoluer et ne pas rester bloqué.

DWT : C’est par exemple ce qui s’est passé dans l’album des Rita Mitsouko auquel tu viens de participer ?
Dee Nasty : C’était différent car j’étais invité sur l’album. C’est d’ailleurs un truc pour lequel je ne suis pas spécialement fier. En plus, je les voyais comme des gens plus sympathiques qu’ils ne le sont réellement. J’étais donc invité sur l’album comme un percussionniste. Je pense que c’est bien qu’un DJ soit considéré comme un musicien. Cela dit, quand c’est un vrai groupe de rap qui rajoute des musiciens, ça me choque. Je ne trouve pas que le futur du rap doit être comme ça. Ils trouvent comme prétexte que ça fait dix ans que c’est comme ça et qu’il faut évoluer et ne pas rester bloqué. Le problème est qu’il y a beaucoup de gens qui font pression pour que se soit la direction que doit prendre le hip hop. Je trouve que c’est un non-respect que de faire ça, ne serait-ce que par rapport à la manière dont cette culture est née. Par exemple, dans les émissions musicales live, pour pouvoir y passer, il faut un orchestre… Ils se demandent aussi pourquoi payer des autorisations de sample alors que se serait moins cher de payer des musiciens pour qu’ils rejouent les passages. Cela dit, ça n’empêche pas que dans mon album, j’ai invité des musiciens. Mais ils sont intégrés au tout, on n’y fait pas attention car ils ne sont pas mis en avant, et ça reste dans l’esprit hip hop car ça ne devient pas du jazz-rock ou autre chose.

DWT : Mot de la fin ?
Dee Nasty : Il n’y en a pas car il n’y aura pas de fin. Donc mot de la fin : la suite ! J’espère que ça ne va froisser personne que je finisse avec un soutien inconditionnel à Get Busy dans le «mouvement» même si ce n’est pas limité à eux.

Dee Nasty, down with the King

Interviews, Non Classe
Dee Nasty, Lionel D, Mr Freeze, Nova, solo, Zekri

Pourquoi je suis dans la case dans laquelle ils m’ont mis ? En plus, elle est trop petite pour moi.

Dee Nasty passe des disques comme on passe un message. Son premier LP, «Paname City Rappin», est enregistré en 1984 et c’est le premier du genre autoproduit de France. Dix ans après (voir notre interview de l’époque ici), Dee Nasty nous avait présenté son troisième album « Le Deenastyle » avec la participation du regretté East (RIP). Il est l’un des rares qui n’a eu de cesse de favoriser l’émergence du hip hop en France, d’abord avec des micros ouverts sur le terrain vague de La Chapelle en 1986 puis notamment en 1988/1989 grâce à son émission mythique « Deenastyle » qu’il animait avec Lionel D sur Radio Nova, servant ainsi de tremplin aux premiers groupes de rap français signés en major. Aujourd’hui, Dee Nasty est Grandmaster. Une dénomination qu’on pourrait qualifier de folklorique mais qui n’en demeure pas moins une distinction certaine dans le monde des Dj’s dont il est le seul dépositaire en France. Méchant aux platines, pas assez dans la vie, il n’a souvent eu pour seul retour qu’un mépris déconcertant. Dur à accepter de la part d’un mouvement dont le mot d’ordre est unité. Il n’en demeure pas le moins également le pilier d’un hip hop qui nous a permis de nous évader de notre condition sociale, tout comme il a pu en échapper…

Down With This : D’abord, pour commencer, nous sommes honorés que tu refasses une nouvelle fois la Une de DWT, 20 ans après la couverture de notre numéro 5 (disponible ici). Voilà qui est dit (rires général). Tu es originaire de quel quartier ?
Dee Nasty : Je suis né à Vincennes. J’ai apparemment vécu un an rue Clavel à Belleville, Paris. Par la suite, direction Bagneux, en HLM. Mes parents avaient eu un appartement à la « Pierre Plate », un quartier tristement connu pour être la cité du gang des barbares. L’immeuble venait de sortir de terre. Il était tout neuf.

J’ai failli grandir dans une communauté qui vit comme au moyen-âge, sans voiture, sans téléphone (…) et qui s’habille avec des vêtements en laine de brebis. (…) Ça ne m’aurait pas dérangé.

DWT : Dans quel contexte familial as-tu grandi, que faisaient tes parents ?
Dee Nasty : Ma mère était femme au foyer, elle faisait de la couture. Elle s’occupait d’un atelier de peinture libre dans un centre culturel, le centre Alpha. Ils avaient de bonnes idées avec un petit côté catho. C’était l’époque qui voulait ça. Avec mai 68, il y a eu beaucoup de passage chez mes parents, ils ont fait des manifs, la grève de la faim pour plusieurs trucs, etc… Activistes militants donc. Mon père travaillait à l’aéroport d’Orly. Ils écoutaient de la flûte de pan. J’ai failli grandir dans une communauté qui vit comme au moyen-âge, sans voiture, sans téléphone, la communauté « L’Arche », fondée par Lanza Del Vasto. Ils s’habillent avec des vêtements en laine de brebis. Pour un gamin c’était fun, ça me changeait de la cité de la « Pierre Plate ». Que mon père arrête tout pour partir là-bas, ça ne m’aurait pas dérangé. Avec mes sinusites a répétitions, je ne supportais pas la poussière de la ville. Tout allait mieux à la campagne. Ça m’aurait permis de faire autre chose que de jeter des cailloux sur les autres. Je commençais à mal tourner, de bagarre en bagarre. J’étais un peu le souffre douleur : grand, blond et des yeux bleus. Je me prenais des cailloux sans savoir d’où ils venaient. En plus, ma mère m’habillait comme un petit bourge alors que ce n’était même pas notre cas. Quand j’ai commencé à pouvoir me défendre, ça a commencé à mal tourner. Je suis parti de Bagneux à 14 ans, pile au bon moment. Deux ans en Seine-et-Marne avec mes parents, puis je suis parti vivre ma vie.

DWT : 16 ans, c’est tôt pour quitter tes parents. Tu avais déjà des modèles à l’époque ?
Dee Nasty : J’ai des origines bretonnes donc je me suis pas mal intéressé à Alan Stivell et tout ce qu’il défendait. J’ai voulu apprendre le breton mais à côté de ça, j’adorais la soul et j’étais fan des Isley Brothers. Tout ça avait du mal à se concilier dans ma tête. J’avais pleins de potes qui écoutaient du rock et j’adorais ça aussi. Mais pour répondre à votre question, je n’avais pas de super héros (rires).

En 1978, j’ai eu une platine d’appartement, juste pour l’écoute, avec un ampli, un tuner et magnéto à bande. Comme beaucoup de monde à l’époque finalement.

DWT : Comment en arrives-tu aux platines ?
Dee Nasty : En 1978, j’ai eu une platine d’appartement, juste pour l’écoute, avec un ampli, un tuner et magnéto à bande. Comme beaucoup de monde à l’époque finalement. Ça m’avait familiarisé avec ces machines. Puis j’avais acheté une cellule avant/arrière et j’avais scié le plateau pour qu’il soit plus léger. Ce qui a déréglé le régulateur de vitesse… (rires) J’ai trouvé par moi même qu’un sac en plastique FNAC découpé plus une feuille de papier permettait de faire glisser les disques. J’ai surtout eu la chance d’habiter à San Francisco et de découvrir le hip hop aux Etats-Unis. J’avais eu aussi l’exemple de Grandmaster Flash avec The Adventures Of Grandmaster Flash On The Wheels Of Steel. Ca m’avait influencé. Automne 1982, il passe au Palace avec les Furious Five et je le vois live. C’était particulièrement impressionnant. Trois semaines avant il y avait eu le « New York City Rap Tour » avec Afrika Bambaataa.

DWT : C’est à ce moment que tu te diriges vers des studios de radio…
Dee Nasty : J’ai eu une émission, « Funkabilly », sur Radio Ark en Ciel qui émettait de Barbès sur le nord de Paris et le bas de Saint-Denis. J’achète quelques disques de funk et je commence à toucher les platines sauf qu’il en avait une dans un coin et l’autre un plus loin, donc impossible de mixer ! J’avais un pote antillais, Bruno Funk, qui est remercié dans chacun de mes albums. Il me fait connaître un pote, Maurice, qui jouait au Palace (ndlr : Boris, et non pas Maurice, erreur de retranscription – mise à jour du 15/12/2015 –). C’était le DJ avec Sidney. Il me propose de venir faire des séries Jazz Funk Hip Hop du moment dans les soirées antillaises. Cela marchait bien. Je commence à découvrir les platines en passant d’un disque à l’autre en faisant des enchaînements à peu près cohérents. Ça se passe super bien et je continue.

DWT : Tu es sur quelle table de mix à cette époque ?
Dee Nasty : A l’époque, en 1982, je m’achète un petit mixeur où il n’y avait pas de pré-écoute. Je ne sais même pas s’il y avait une marque mais il y avait deux potards. C’était plus un mélangeur. Ma table d’après m’a plus marqué, c’était une BST.

DWT : A cette époque des « radios libres », tu te retrouves par la suite dans des radios assez « charismatiques »…
Dee Nasty : Il y a eu des fusions forcées entre les radios et je me suis notamment retrouvé sur différentes radios comme Fréquence Gay. J’avais mon émission mais il y avait une sorte de racisme des homos envers les hétéros, comme si on avait rien à foutre là. C’était un peu le cas. Je décrochais le téléphone pendant l’émission et c’était uniquement pour me faire draguer.

J’allais aussi à RDH, à Rosny-sous-Bois, la « Radio des handicapés », ça fait rire tout le monde mais c’est vrai ! J’avais un créneau funk et rap de deux heures. C’était de 1983 a 1985.

DWT : Vient ensuite Carbone 14 avec une émission qui était apprécié par de nombreux auditeurs…
Dee Nasty : Cette émission, Planète Funk, n’a pourtant duré que six mois… Je connaissais des gens à Carbone 14, j’y suis donc allé et ça a collé. J’avais carte blanche, trois platines et une boîte à rythme. J’invitais des potes pour des sessions. Mais en 1983, Carbone 14 n’a pas sa licence et ça s’arrête. C’était dans le bas de Bagneux. J’arrive un jour et j’apprends que des CRS avaient tout emmené. Tout le monde était en larmes. C’était une époque durant laquelle il y avait des camionnettes avec de grosses antennes sur le toit qui cherchaient les émetteurs pirates. Puis il y a eu Supernana avec Radio Aligre. J’allais aussi à RDH, à Rosny-sous-Bois, la « Radio des Handicapés », ça fait rire tout le monde mais c’est vrai ! J’avais un créneau funk et rap de deux heures. C’était de 1983 a 1985. Ils n’ont pas eu l’autorisation de continuer non plus.

DWT : S’en suit les grandes heures à la Chapelle/Stalingrad. Comment t’es venu cette idée de passer par-dessus un mur de deux mètres de haut avec des platines et un groupe électrogène ?
Dee Nasty : Toujours pendant mes courses, à la Plaine Saint-Denis, je vois un magasin avec un groupe électrogène à louer. C’était super pas cher et il fallait juste une petite caution pour le louer. Arrivé au terrain, mon scooter servait de marche pied. Il y avait toujours des gars pour me donner un coup de main. On passait tout par dessus le mur : électrogène, ampli, enceintes 150 watts et mes deux platines Technics que je venais juste d’acheter. Après, j’allais à la station service juste à côté pour récupérer de l’essence avec un jerricane. On mettait le groupe le plus loin possible car sinon c’est comme si tu avais une mobylette qui tournait dans ta tête (rires). Ça valait le coup.

On passait tout par dessus le mur : électrogène, ampli, enceintes 150 watts et mes deux platines Technics que je venais juste d’acheter.

DWT : Tu embrasses très vite la Zulu Nation et rencontre également très tôt Afrika Bambaataa. Ca a été salvateur ?
Dee Nasty : Ça semblait naturel. J’étais parti dans ma vie dans quelque chose où je ne serai pas resté vivant très longtemps. Cela m’a donné une énergie suffisamment forte de voir ces gars de là-bas qui sont sains, qui défendent des valeurs simples alors qui sont plus dans la merde que nous. Paix, amour, unité. Ça m’a fait le plus grand bien. Je me suis m’y dedans avec autant beaucoup de force. Après, ça ne m’a pas lâché. J’ai rencontré Bambaataa à Radio 7, avec Sidney, il faisait des dédicaces. Je considère que grâce à ce mouvement, je suis devenu Deenasty. Sinon, je serai resté Daniel Bigeault, une espèce de loser, un mec dont on ne sait pas vraiment ce qu’il va devenir. Il y a encore plein de chose à faire. Ce n’est pas un message galvaudé même si j’ai mis beaucoup d’années à reconstruire la Nation Zulu en France.

A treize ans, j’étais alcoolique juvénile. A 17, déjà tox. Après, c’est un combat de la vie. Forcément, c’est une canne qui t’aide à marcher. J’ai vu des docteurs, etc… C’est des périodes de la vie.

DWT : Tu as connu des moments durs dans la vie avec la drogue, l’alcool. Comment y as-tu fait face ?
Dee Nasty : C’est arrivé bien avant le hip hop. A treize ans, j’étais alcoolique juvénile. A 17, déjà tox. Après, c’est un combat de la vie. Forcément, c’est une canne qui t’aide à marcher. J’ai vu des docteurs, etc… C’est des périodes de la vie. Ce qui est rigolo, c’est que dans les périodes les plus sobres, on disait : « oh, Deenasty est en forme, il a pris de la coke ! », « oh, Deenasty est fatigué, il a pris de l’héro ! ». On ne te lâche pas avec ces : « oh, il est retombé dedans » alors qu’en fait, rien du tout. Un jour, je vais écrire un bouquin avec le pourquoi du cheminement, la rue, les rencontres, les braquos. Tous les trucs d’un jeune qui fait qu’il n’a que sur lui qu’il peut compter, et surtout pas sur son entourage. J’ai eu une hépatite B, une hépatite C, j’ai fait une rémission. Je me suis guéri tout seul. Le truc incroyable vu ce qui m’attendais. Je m’en suis bien sorti. La musique m’a sauvé. Certains peuvent se permettent des trucs, ça fait parti de leur image Rap’n’Roll mais moi, ce n’est pas possible. Je ne comprends pas trop pourquoi d’ailleurs. L’alcool, c’est venu plus avec le temps, de soirées en soirées. Ce n’était pas mon truc principal. Très jeune oui mais je m’en étais détaché. Moi, c’était coke puis héro depuis l’âge de 17 ans. J’étais jeune. Il faut savoir qu’un produit est un outil. Il faut savoir le considérer comme tel. Ça peut servir à quelque chose. Ça peut être un outil pour renforcer une personnalité un peu perdu mais il faut vraiment avoir une sorte de grand frère pour ne pas que ça parte en couille. Je n’ai jamais été suicidaire. Je consommais parce que j’avais un travail super dur pour lequel je restais 14 heures sur un scooter dans le froid et sous la pluie. L’héro tient chaud. C’était le cas pour tous les coursiers avec qui je travaillais. Tout le monde se disait qu’on n’y touchera pas et c’est rentré dans le milieu de la course. Tu ne vois aucune autre perceptive que celle de rester coursier. Tu risques ta vie tous les jours. C’est une sorte de cercle… J’ai perdu énormément de gens pendant cette période, par des overdoses, des accidents, sans parler des handicapés a vie. Certains ont fait des braquos mal préparés et sont tombés. Beaucoup était souriant quelques années auparavant puis l’héro est passée par là. C’était vraiment des histoires à la con.

DWT : Dans ton parcours d’homme de radio, il y a surtout ton émission myhtique « Deenastyle » que tu animais avec Lionel D sur Radio Nova et qui a marqué l’histoire du rap en France. On t’a pourtant entendu dire à plusieurs reprises que Radio Nova n’avait pas tant soutenu le hip hop au moment de ton émission. Pourquoi ?
Dee Nasty : Tout à fait. Mais il y a eu plusieurs phases. D’abord, Radio Nova joue plutôt du Flamenco, du Zouk, de la world music. Bernard Zekri m’approche via Destroy Man et Johnny Go. Je travaillais dans le même studio à cette époque. Je participe à un morceau avec eux et Bernard Zekri suit l’histoire. Il avait entendu parler de moi via les free jams de La Chapelle. Je lui raconte mon parcours et lui dit que je suis un grand fan de lui, ce qu’il ne savait pas. Il me dit : « écoute, je vais parler de toi à Martin Meissonnier pour qu’il fasse une émission avec toi ». On fait une émission zéro avec Martin Meissonnier comme réalisateur. Et je me retrouve avec une demie-heure par jour dans laquelle je peux faire des thématiques gogo, break beat, hip hop old school, new school avec les débuts de Public Enemy par exemple sous le nom de Spectrum City.

Bernard Zekri m’approche via Destroy Man et Johnny Go. Je lui raconte mon parcours et lui dit que je suis un grand fan de lui. Il me dit : « écoute, je vais parler de toi à Martin Meissonnier pour qu’il fasse une émission avec toi ».

C’était à la même époque que Chez Roger Boîte Funk. J’étais payé 500 francs. J’ai eu le malheur de demander une augmentation à Jacques Massadian et je me suis fait virer. On me sucre aussi mon émission radio et je passe à vingt minutes ou je dois passer des sons sans parler. Au final, on me vire encore puis on me redonne une autre émission, le dimanche soir de 22 heures à minuit. Comme ils n’aimaient pas comment j’animais, ils me mettent avec Lionel D qui faisait aussi les bons plans rappés sur Nova avant de se faire virer lui aussi. On est content de se retrouver mais on se dit « qu’est ce qu’on va faire pendant deux heures ? ». On décide de faire une heure de rap ricain puis une heure de rap français. Au départ, on ne pensait pas inviter tout le monde car on n’avait pas de carte blanche. Mais comme c’était le dimanche soir, il n’y avait plus personne dans la radio. La première émission, Lionel balance tous ses textes. On se dit « merde, ça c’est fait. Qu’est ce qu’on va faire maintenant ? » L’émission d’après, on invite Les New Génération MC’s avec EJM. Et boum, c’est une évidence ! Lionel anime et fait passer le micro. La semaine d’après, il y a vingt personnes en bas qui veulent rapper. On dit « ouais, venez ! ». On ne peut pas savoir à l’avance le niveau. On ne peut pas faire d’audition. On est des potes bienveillants. Les émissions passent et on se retrouve avec des cinquantaines de personnes qui déboulent dans l’émission chaque semaine. Y a des talents et des trucs moins bien. On se dit qu’une fois revenu dans leurs quartiers, ils vont se faire charrier un peu mais du coup, ils vont travaillé et revenir mieux préparé. Petit à petit, le niveau monte. Je me rappelle notamment de Coffee B, rien que son nom, c’était rigolo. Il y avait Les Little, Rico qui venaient tout le temps. Des collectifs de banlieues différentes montaient à la radio. Un jour, NTM et Assassin veulent participer à l’émission mais ils se viandent. J’étais obligé de passer les disques qu’ils voulaient et ça m’énervait car normalement, je faisais ma programmation et tout le monde s’adaptait aux disques que je jouais. Ils se rendent compte que ça se passe mal pour eux et décident de préparer un deuxième passage qui sera plus professionnel, sans pour autant voir le niveau des autres qui étaient mieux préparés. Ils étaient super arrogants mais ça à contribuer à une sorte d’émulation par des défis artistiques. Nova l’apprend et le prend mal. En même temps, ils voient qu’on gère même si nous étions que deux à tout faire. Lionel pour gérer ce qu’on va appeler le plateau et moi la régie à passer les sons, les micros et faire les mixes avec vingt gars derrière qui n’arrêtent pas de me parler. Un jour, des mecs sont montés sur un radiateur. Résultat : il se casse et tombe en provoquant une énorme fuite d’eau. Il a fallu tout éponger. Il y a eu quelques tags, des mecs qui pissent dans l’ascenseur et les premières réflexions du lundi matin quand les mecs de Nova arrivent. « Pourquoi ça sent la pisse ? ». Ils entendent des gens assez bien placés qui leur disent que leurs gamins écoutent l’émission le dimanche soir et se rendent compte de la place que ça a pris en l’espace de seulement quatre dimanche. Ça y est ! C’était du feu de Dieu avec le vrai Deenastyle. Nova laisse faire mais ce n’est pour autant qu’ils pensent à mettre quelqu’un de la radio ou de la sécurité pour nous aider. Et arrive ce jour quand des gamins d’Orly volent le standard de la radio. Invendable mais du coup, le lundi, plus de standard dans la radio. Résultat : Lionel D et Deenasty persona non grata à Radio Nova. Au final, Lucien qui revenait de New York, et qui venait tout le temps nous voir, retrouve le standard trois jours après et nous le ramène. L’émission ramenait beaucoup de monde. On arrivait à les faire partir mais il fallait tout nettoyer après, jusque dans la cour et les tags dans les chiottes ! On avait juste un sceau d’eau et du St Marc pour tout nettoyer après. Jean-François Bizot nous disait : « il faut laisser l’endroit tel que vous l’avez trouvé » mais des plaintes commençaient à tomber au sujet des tags de la cour. Alors on brossait, on brossait (rires).

On se retrouve avec des cinquantaines de personnes qui déboulent dans l’émission chaque semaine. Y a des talents et des trucs moins bien. (…) On avait juste un sceau d’eau et du St Marc pour tout nettoyer après. Jean-François Bizot nous disait : « il faut laisser l’endroit tel que vous l’avez trouvé »

J’aurai pas dû mais c’était injuste ce qu’ils nous avaient fait. Du coup, l’émission d’après les IZB déboulent à une cinquantaine avec Jaïd en tête. (…) Certains ont des flingues et les ont sorti.

DWT : Ton émission servait également de relais pour la promotion des soirées, notamment celles organisées par IZB…
Dee Nasty : Ils venaient toutes les semaines pour promotionner leurs concerts de rap américains. D’ailleurs, contrairement à ce qu’ils disent dans le livre « Regarde ta jeunesse dans les yeux », c’est moi qui leur présente le manager de Public Enemy alors qu’ils disent qu’ils le rencontrent par hasard. Je ne suis pas le hasard. C’est grave mais ça ne m’étonne pas. C’était d’ailleurs grâce au manager de PE que le groupe était venu Chez Roger Boîte Funk gratuitement, parce que je l’avais rencontré à New York. IZB décide six mois à l’avance de faire un gros truc à l’Elysée Montmartre. On en parle chaque semaine dans l’émission. Deux semaines avant, Lionel et moi leur disons qu’on apprécierait avoir deux invitations. Mais les invitations n’arrivent jamais bien qu’ils nous les promettent. Du coup, avec Lionel, on va sur place mais pas d’invitations pour nous à la caisse. Puis on nous dit : « toi, Dee Nasty, tu as un invit mais pas Lionel D ». Du coup, on regarde ce qu’on a dans nos poches et on paie la place. On rentre dans la salle et IZB nous regarde bizarre. On reste un peu puis on s’en va. Et ça monte, ça monte. L’émission d’après c’est moi qui sors « ouais les IZobie Mamie Nova ne vous dit pas merci ». J’aurai pas dû mais c’était injuste ce qu’ils nous avaient fait. Du coup, l’émission d’après les IZB déboulent à une cinquantaine avec Jaïd en tête. Ils sont bloqués par Jacques Massadian qui fait du sport. Ils demandent un droit de réponse et c’est Jaïd qui monte, il passe derrière le micro pour dire que des conneries. Je dis aussi ce que j’ai à dire. Résultats des courses : certains ont des flingues et les ont sorti. Certains le racontent et sont super fiers. Ils peuvent : cinquante contre deux, waouh, c’est extraordinaire !

DWT : La suite ?
Dee Nasty : Ben on s’est fait virer. Le Deenastyle, c’était bien gentil mais terminé. On a eu droit a une dernière émission et c’est là que j’ai écris « Le rap pour un con ». Ils m’ont pris pour un con. On n’était même pas payé, on faisait ça pour l’amour du truc. Les IZB s’étaient auto-proclamé les « Incredible Zulu Boys » alors qu’ils n’étaient même pas zulus. Ce qui est extraordinaire, c’est que je viens tout juste de nommer Jaïd car il ne l’était même pas. Bambaataa m’a permis de nommer des gens. J’ai donc nommés lui et Lord Salim.

Je tombe sur Lionel D et lui fais écouter mon album avec mon poste-radio. Il me dit que lui aussi rappe en français. On forme par la suite un groupe qui se nomme Platinum Squad.

DWT : Comment avais-tu rencontré Lionel D ?
Dee Nasty : A la sortie de mon disque Paname City Rappin’ en 1984. A la fête de la musique, avec mon pote Bad Benny de RDH. Afrika Bambaataa officie sur la place du Trocadéro, je tombe sur Lionel D et lui fais écouter mon album avec mon poste-radio. Il me dit que lui aussi rappe en français. Il me fait un rap, du coup on l’invite sur RDH et de là est né un truc. Pas une amitié mais un premier contact. On forme par la suite un groupe qui se nomme Platinum Squad, avec un batteur, moi à la boîte à rythme et une seule platine pour les scratchs. On rappait tous les deux. Surtout en français même si Lionel maîtrise bien le rap en anglais. J’ai une seule cassette qui témoigne de cette époque. Après on essayait de jouer au Bataclan mais on ne nous a jamais laissé faire. Même pas un petit show-case, rien. C’était chacun son crew à cette époque.

DWT : Historiquement, à quel groupe as-tu appartenu vraiment ?
Dee Nasty : Ben aucun à ma connaissance (rires).

DWT : C’est très rare que nous menions des interviews dans le cadre d’une promo. C’est avec plaisir que nous dérogeons à la règle pour soutenir la sortie de ton nouvel album, « Classique ». Pour commencer : tu le sors chez Celluloïd, tu t’es fait un énorme kiffe ?
Dee Nasty : Celluloïd était intéressé. Ça c’est fait avec Gilbert Casteo qui est associé avec Jean Karakos. Il connait mon éditeur qui lui en a parlé. Ce n’est pas évidement, il a 77 ans, ils sont trois dans le label mais je suis content car c’est un clin d’œil avec le passé. Je rêve maintenant de refaire un maxi avec exactement la même pochette de l’époque.

Pour ceux qui l’ignorent encore, je compose, je joue de la musique, je joue de la guitare. J’ai envie de le faire savoir.

DWT : Cet album contient également des featuring aussi différents qu’incroyables : Rachid Taha, Afrika Bambaataa par exemple ! Il n’y a que toi pour faire des choses comme ça dans le hip hop.
Dee Nasty : Avec Rachid Taha, on a toujours rêvé de faire quelque chose ensemble. C’était l’occasion, il a dit oui tout de suite. On a fait ça chez lui. Il a demandé à son fils de brancher le micro et on a fait ça d’une prise ! Je trouve que c’est le seul rocker légitime de France. C’est un gars que j’adore artistiquement. J’aimerai qu’on fasse un album ensemble. On a fait deux morceaux ensemble qui sont très réussis et personne ne l’a emmené sur le terrain de l’électro funk. Pour Bambaataa, il était à Paris, invité par LBR. On a enregistré chez lui : un morceau et deux pistes Freestyle. Sur cet album, j’avais la liste des gens avec qui je voulais travailler. Je voulais aussi faire un trio de DJ’s. Personne ne s’occupe de moi, j’ai certes un éditeur mais je voulais surtout prouver que je suis un musicien. J’en ai marre qu’on me dise que mes albums sont des compilations ou des mix-tapes. Pour ceux qui l’ignorent encore, je compose, je joue de la musique, je joue de la guitare. J’ai envie de le faire savoir. Tout cela c’est fait naturellement. J’ai commencé cet album il y a quatre ans. Le dernier était tellement passé inaperçu que j’avais une revanche à prendre et ça a donné un album dont je suis fier.

DWT : Au cours de ta carrière, tu as recroisé la route des NTM. Parle-nous de ton travail que tu avais réalisé pour la sortie de leur troisième album, disque de platine, « Paris sous les bombes » ?
Dee Nasty : J’ai fais l’instru de « Come Again » (Pour que ça sonne funk), la première version. L’album devait sortir trois mois après. On était au Studio de la Seine. Ils étaient venus chez moi écouter le morceau et choisir une instru, que j’avais fait pas spécialement pour eux d’ailleurs, pour Big Brother Hakim je crois. On l’enregistre. Je fais aussi une version remix et une version dub. Ils sont contents puis plus de nouvelles. J’apprends un jour que l’album sort et je rencontre Joey Starr qui me dit : « Oh ! En fait, on a pas gardé ton instru, c’est Clyde qui a refait la musique ». Ok, ça aurait été sympa de me le dire d’autant plus que j’avais été payé en avance pour la sortie du maxi. Donc l’avance de 10 000 francs qu’on m’avait fait, je la dois encore à Sony Epic. Tous les ans, je reçois des relevés avec moins 10 000 francs dessus. On s’est recroisé vite fait mais ils s’en battent les couilles en me disant qu’ils ne s’occupent pas de la partie business. J’avais aussi failli faire une tournée avec eux. DJ Clyde était parti. J’étais déjà en tournée avec Big Brother Hakim, faute de temps, j’ai proposé le truc à un mec du magasin LTD, ancien disquaire de Châtelet Paris. Il ne pouvait pas non plus mais en a parlé à son cousin, Dj James. Il a été auditionné puis retenu. J’espère qu’il sait que c’est grâce à moi (rires).

DWT : As tu des nouvelles de Big Brother Hakim ?
Dee Nasty : Oui, il habite mon quartier. Il est à cinquante mètres de chez moi. On est toujours fâchés mais on se croise.

Pourquoi ils m’ont éradiqué du truc ? Je ne comprends pas. Je pus de la gueule ? Je suis infréquentable ? Ils ont peur de quoi ?

DWT : Que ressens-tu à propos de certaines « cérémonies » sur le hip hop comme il a pu en avoir il y a quelques années à l’Olympia ou à La Cigale en 2012 dans lesquelles tu n’es même pas récompensé, ni même invité ?
Dee Nasty : Cela me met dans une rage folle. Heureusement, j’ai ma femme qui arrive à me recentrer. Ça me met en colère. Je trouve ça super injuste. En même temps, je n’avais pas envie d’y être parce que d’entrée, je trouve que ça pu. Mais je me dis : « Pourquoi ils n’y ont même pas pensé ? » Et s’ils y ont pensé, « Pourquoi ils m’ont éradiqué du truc ? ». Je ne comprends pas. Je pus de la gueule ? Je suis infréquentable ? Ils ont peur de quoi ? Je pense, en fait, qu’ils n’y ont juste pas pensé… C’est un peu particulier. Cela n’a jamais été facile pour moi. Autant le respect vient avec le temps mais là, c’est un respect forcé car j’arrive encore à m’accrocher. Il y a beaucoup d’empathie du genre « Le vieux, il s’accroche, il n’a que ça dans la vie ». C’est ce que je ressens comme réaction quand je joue dans des bars : « ah ouais, toi là ? », genre, je mériterai mieux. Mais non, moi j’adore faire ça ! En tout les cas, je n’ai pas lâché, j’ai encore des choses à dire et j’aimerai comprendre pourquoi je dérange au point d’occulter le fait que j’existe. Et pourquoi je suis dans la case dans laquelle ils m’ont mis ? En plus, elle est trop petite pour moi cette case.

J’ai encore des choses à dire et j’aimerai comprendre pourquoi je dérange au point d’occulter le fait que j’existe. Et pourquoi je suis dans la case dans laquelle ils m’ont mis ? En plus, elle est trop petite pour moi cette case.

Je fais venir Cash Money pour me mettre en danger mais pour montrer aussi que je suis aussi le patron. C’est un mec que j’idolâtre. Je savais très bien qu’au lendemain de son passage, les mecs allaient dire « ah mais Deenasty, c’est pas le meilleur ».

DWT : Tu étais pourtant au sein d’un gros collectif de DJs lorsque le Double H de Cut Killer se monte…
Dee Nasty : Les premiers temps, je suis chez Roger Boîte Funk. Cut Killer vient me voir car c’est juste a côté de chez lui et que je suis un peu l’icône en tant que DJ. Effectivement, j’ai fait troisième au championnat du monde à ce moment-là. Sur la fin de Chez Roger, j’ai des contacts avec Cash Money. Donc je fais venir Cash Money pour me mettre en danger mais pour montrer aussi que je suis aussi le patron. C’est un mec que j’idolâtre. Je savais très bien qu’au lendemain de son passage, les mecs allaient dire « ah mais Deenasty, c’est pas le meilleur » et que je m’en inspire. Cut Killer, à ce moment là, il a vu les deux dans l’art du djing. Il faut savoir que Cut Killer était le DJ des IZB et le moins qu’on puisse dire, je n’étais pas très proche d’eux… Quand Cut Killer a pris ses distances avec eux, on a pu se parler. Mais c’est DJ Abdel qui m’a vraiment fait rencontrer Cut Killer. L’idée du Double H est venu après. J’y adhère. Il y avait East dedans (RIP). Je les invite sur mon troisième album, « Le Deenastyle ». Ils avaient une bonne place dedans, premier morceau de l’album, puis participation à la tournée promo que Polydor avait organisé. Tout se passe bien sauf que Cut Killer et East veulent avoir leur truc à part. Après, il y a l’histoire du « Diamant est éternel ». J’avais invité tout le monde. Mais Cut Killer et son manager estimaient que sa notoriété était plus importante et qu’il devait recevoir plus d’argent que les autres.

J’avais invité tout le monde. Mais Cut Killer et son manager estimaient que sa notoriété était plus importante et qu’il devait recevoir plus d’argent que les autres. Ce que je refuse, ça part en couille.

Faster Jay voulait aussi plus d’argent. J’ai dis non, que ce n’était pas possible. Je tenais à ce que tout le monde soit au même niveau, ce que la plupart avait accepté et c’était très bien comme ça. Ça devient finalement un truc super houleux, super tendu. On se réconcilie par la suite et : « ok, vas-y pour le Double H« . Au démarrage, je donne tous mes contacts et donc tout le monde appelle le Double H et je me fais voler mes soirées. Je me rends compte que c’était le même état d’esprit que sur « Diamant est éternel ». La dernière tentative, c’est quand j’ai fait Dj School. J’y invite Cut Killer pour faire une démo dedans et il fait un procès parce qu’il trouvait que son nom avait été écrit trop petit et que par contre, sa tête était trop grosse. La dernière fois qu’on c’est vu, c’est au Rex. Le mec fait un truc de double face tout le temps. C’est insupportable. Alors que j’étais en galère de thune un jour, et que je n’avais jamais rien touché sur mes collaborations avec le Double H, je lui demande de me prêter de l’argent, 500 euros. Il ne m’en propose que 200… Je n’ai même pas été récupérer l’argent, j’ai envoyé un pote. C’était de la carambouille tout le temps. Rien à voir avec DJ Abdel, je lui demandait 500€, c’était direct : « ben passe demain au bureau chercher l’enveloppe » et il me filait 1000€ sans que j’ai besoin de lui rendre, en me disant que je les méritait avec tout ce que j’avais fait pour lui.

Moi j’étais dans la case toxico donc ils disaient : « Deenasty, lui il est perdu, on l’oublie, bon débarras ». Ce n’était juste plus supportable.

DWT : On a pu lire que tu avais été très en colère contre le Double H. Irais-tu jusqu’à dire que tu étais là au bon moment, juste pour légitimer cette formation ?
Dee Nasty : Je pense que oui. On fait une réunion chez Double H un jour, rue Saint-Hippolyte. Une réunion dont l’ordre du jour était la côte de chaque DJ… Cut 8 000 euros, Abdel, 7000 euros, moi et LBR, 2 000 euros chacun. C’est là où j’ai arrêté. J’ai dit : « C‘est une période de solde ? ». On m’a dit que j’étais trop old school. J’avais les mêmes disques mais on me faisait passer pour l’after de Cut… A l’époque, le terme « old school » était plus une insulte qu’autre chose. On était en fait tous employé à travailler pour Cut Killer et dorer son blason continuellement. Moi j’étais dans la case toxico donc ils disaient : « Deenasty, lui il est perdu, on l’oublie, bon débarras ». Ce n’était juste plus supportable.

Cut Killer Double H - Dee Nasty - DWT Magazine - Down With This

DWT : Tu te plaignais d’ailleurs à cette époque de ne plus recevoir les disques des labels et qu’ils allait tous chez Cut Killer…
Dee Nasty : Ouais, c’était ça. J’en recevais un peu mais le problème à l’époque, c’est qu’il y avait des mecs qui travaillaient à la poste de Riquet et qui me prenaient tout avant que ça arrive. J’avais juste l’avis dans la boîte aux lettres. Du coup, j’allais directement voir les labels pour récupérer les disques. À ce moment-là, j’allais régulièrement à New York. Il y avait des soirées où ça passait beaucoup de rap français. J’ai fait beaucoup de promotion de rap français, qui était à mes yeux à ce moment arrivé à son âge d’or. Il était en cohérence totale. Il y avait un magasin de skeud « Liquid Sky » à Alphabet City qui voulait faire un bac de rap français. J’y jouait le week end que du rap français et ça avait commencé a fédérer tous les expatriés et des américains intéressés par ça. Les labels comme Nouvelle Donne ou Double H me disaient « mais on s’en fout de vendre dix pièces à Manhattan« . Dommage, cela les intéressait beaucoup. En considérant déjà les 80 000 jeunes haïtiens francophones qui kiffaient le rap, plus les « expats« , ça faisait du monde.

DWT : Tu as sûrement la collection de vinyles la plus importante de France en matière de hip hop et d’électro funk. C’est un héritage important pour ton enfant…
Dee Nasty : Oui, en gros 25 500 disques. Ca fait cinq tonnes. C’est un héritage un peu lourd. (rires) Le temps qu’elle fasse le tour de tout ce qu’il y a… Est-ce qu’en grandissant, elle va aimer ces disques-là ? Je pense que oui mais ce n’est pas forcément un cadeau. Elle a des goûts divers et variés comme un enfant de onze ans. Moi par exemple à cet âge, j’aimais encore Claude François. Elle sait que ça va être ses disques alors elle me dit d’en prendre bien soin. Et après, qu’est ce qu’elle va en faire ? Ça prend beaucoup de place. Elle aura de quoi se souvenir de papa, ça c’est sur (rires).

DWT : Premier vinyle ?
Dee Nasty : C’était une compilation, Dance For Ever, avec No Milk Today et Fever. J’étais en colonie de vacances. J’étais tombé amoureux d’une fille de mon âge lors d’une boum et il y avait ce disque qui passait. Je voulais absolument retrouver ce disque au Prisunic ou Monoprix de Montrouge (rires). J’ai aussi trouvé peu après un 45 Tours sur un marché, Les Poppys.

DWT : C’est notamment durant ton « époque coursier » que tu as récupéré pas mal de vinyles dans les maisons de disques…
Dee Nasty : Pas dans les maisons de disques, bien que je dépouillais les colis des postes. Mais il n’y avait que de la merde, alors j’ai arrêté de le faire. J’en prenais un ou deux et puis je refermais le colis (rires). Ils ne sont rendus compte de rien. Coursier me permettait surtout de passer chez tous les disquaires.

Ça fait que quelques années que j’ai réussi à me sevrer de cette envie irrépressible d’aller acheter les dernières nouveautés.

DWT : Le dernier Kendrick Lamar ou Young Thug, tu l’as par exemple ?
Dee Nasty : Non parce que c’est un budget. Il faut que je ramène de l’argent à la famille. J’ai déjà claqué pour 25 000 disques tout seul. Ce n’est pas tombé du ciel. On m’en a offert très peu. Ça a été le budget numéro un pendant très longtemps. Ça fait que quelques années que j’ai réussi à me sevrer de cette envie irrépressible d’aller acheter les dernières nouveautés. Une fois que tu as loupé plein de choses, t’es moins pressé, c’est pas grave. Je le trouverai plus tard. Je reste ouvert à ce qu’il se fait mais comme ce que j’aime ne sort pas en vinyle, du coup je vais me les faire presser. Il y a par exemple du rap australien en ce moment qui est très bon. Nous sommes aussi en plein âge d’or dans le rap latino.

DWT : Si tu devais en garder un seul pour l’emmener sur une île déserte ?
Dee Nasty : The Isley Brothers avec The Heat Is On de 1975 avec le fameux For the Love of You et Fight The Power. C’est mon groupe fétiche avec Slave.

DWT : Comment se fait-il que ta passion pour la musique ne t’ait jamais conduit à ouvrir ton propre disquaire ?
Dee Nasty : J’y pense encore. Mais il me fallait un apport. Aujourd’hui ce serait plus un bar qui fasse en même temps dépôt de disques. Pour les gens du quartier. Servir des verres et passer des sons. Avec une cave pour faire passer des gars. Un truc en gérance. Ça fait dix ans que j’y pense vraiment. J’attends l’opportunité.

Le conseil : c’est de trouver sa propre identité et de défendre son style. Ça servira dans le futur pour dire que c’est untel qui a défendu tel ou tel style.

DWT : Tu as des conseils à donner aux jeunes qui se lancent dans ce délire du vinyle ?
Dee Nasty : Ça dépend si tu es collectionneur ou DJ. Le DJ est un peu attaché à la nouveauté s’il veut être parmi les premiers et se démarquer des autres par rapport au style qui est joué. Le conseil : c’est de trouver sa propre identité et de défendre son style. Ça servira dans le futur pour dire que c’est untel qui a défendu tel ou tel style. Surtout qu’avec internet, les disques ont tous la même valeur partout. Même sur une brocante, les gars savent ce qu’ils vendent. C’est de plus en plus difficile de faire des bonnes affaires. J’ai personnellement quelques connections comme à Miami où on me prépare des lots. J’attends d’en avoir une cinquantaine pour me les faire envoyer.

DWT : Quel est pour toi le DJ le plus technique de France ?
Dee Nasty : Il paraît que c’est Logilo. Après c’est à Crazy B de le dire et de savoir où il se positionne. Logilo a fait plusieurs fois les championnats, Crazy B aussi. Est-ce qu’ils se connaissent ? Est-ce qu’ils s’apprécient ? Qu’ils partagent leurs techniques l’un et l’autre. Après, il y en a qui sont dans l’ombre comme DJ Hitch qui est exactement au niveau de ces deux là. En tout cas, pour finaliser le truc, c’est des Zektariens des platines, ils sont très très hauts. Après, c’est a chacun d’apprécier la musicalité de l’un ou de l’autre. C’est des gars qui ont amené le djing tellement haut…

DWT : Qu’elle est ta spécialité pour ta part ? Cut, passe passe ou plutôt scratch ?
Dee Nasty : Les trois. C’est la même chose. Moi, ma particularité, c’est le « Percu Scratch ». C’est moi qui ait inventé le nom pour que ce soit reconnu par la Spedidam et la SACEM. Il y a le mot « percu » dedans donc à partir de là, tu peux être perçu comme un vrai musicien. Je suis un DJ complet qui peut à la fois être soliste, rythmique et ambiant.

DWT : Et de tous les temps, qui est pour toi le plus gros tueur aux platines ?
Dee Nasty : J’ai beaucoup d’affection pour QBert. On est né sur la même planète, Zektar ! Il est tellement gentil. C’est un amour. Il a sauvé le scratch. Il a inventé le terme de turntablism.

DWT : Si on devait passer un titre à ton enterrement, tu aimerais lequel ?
Dee Nasty : « Fight the Power » en hommage aux Isley Brothers (1975).

Ma mission a toujours été de faire connaître aux gens tout ce à quoi ils n’avaient pas accès. Enfin, faire circuler l’information et la passion.

DWT : Maintenant que Bernard Zekri reprend la tête de Radio Nova via Matthieu Pigasse, penses-tu que nous ayons une chance de t’entendre à nouveau là-bas ?
Dee Nasty : J’en rêverai mais je ne sais pas. En plus, je sais ce que je ferai. Ce serait un global hip hop comme ce que je fais pour RFI. Ma mission a toujours été de faire connaître aux gens tout ce à quoi ils n’avaient pas accès. Enfin, faire circuler l’information et la passion. Au sein de Nova ce serait encore mieux. J’aimerai d’ailleurs qu’ils défendent vraiment mon dernier album et pas juste deux mois en playlist. Il y a plusieurs morceaux dont ceux avec Rachid Taha qui le méritent. Mon album a environ six mois de vie. J’espère qu’il ira jusqu’au printemps. Nova ne l’a pas fait sur les albums précédents, donc j’espère que ce sera le cas sur celui-ci. C’est peut être mon dernier album en tant que tel alors j’espère vraiment.

DWT : Comment qualifies-tu ton entêtement et ta détermination ?
Dee Nasty : Je dirai que c’est un contrat de vie ! Passion, partage et surtout beaucoup d’amour.

Propos recueillis le 13 novembre 2015 par FLo, Fati et Alain Garnier. Photos par © Alain Garnier. Remerciements à Jow-l et Frédérique, Les Disques Pirates. Dédicace à la Zulu Nation France. Peace, love, unity & havin’ fun.

Fab Five Freddy les bons tuyaux

Interviews
Bramly, Fab Five Freddy, Lionel D, solo, Zekri

L’histoire intéressante qui est liée à « comment le hip hop a commencé en France », je crois que c’est quand j’ai rencontré François Bizot à Paris en 1980…

Fab Five Freddy - Exclu Down With This - DWT Magazine

Fab Five Freddy – Photo D.R.

On y est : l’un des plus anciens activistes du hip hop a accepté de répondre en exclusivité aux questions du plus ancien média hip hop de France ! Quoi de plus étonnant finalement puisque DWT, c’est définitivement le média le plus funky de France, qui continue de glisser sur la tête des « journalistes du hip hop » en place ! Véritable touche à tout artistique, original de chez original, old timer de chez old timer, ami du tout New York puis de l’ensemble du mouvement hip hop mondial qu’il a vu naître et exploser, notre hôte du mois est aussi « le journaliste » qui a rencontré la totalité des plus grands représentants de notre culture lors de ses célèbres interviews. Un peu comme nous en somme (rires). A la différence près que ce dernier est nettement plus intéressant que les 3/4 des rappeurs français réunis ! Voici donc le bien nommé, l’inégalable, l’ineffable, le fabuleux, Fab5 Freddy himself ! Qui n’a pas attendu son épopée journalistique chaque semaine sur « Yo ! MTV Raps » ?! Ses interviews improbables dans le vrai « terter » du hip hop, entre le Bronx et Compton mais aussi de part le monde : Japon, Allemagne ou même la France qu’il connait très bien. Nous aurions pu échanger toute la nuit sur les anecdotes qui ont jalonnées sa vie. L’homme qui a côtoyé et signé les interviews de toutes les vraies légendes du hip hop, voir même leurs clips, nous répond enfin. C’est définitivement pour vous et avec honneur sur DWT MAG.

Down With This : Tu es né à Brooklyn en 1959, quel genre de quartier était Brooklyn à l’époque ?
Fab Five Freddy : Brooklyn a toujours été un quartier ouvrier, de classe moyenne.

J’ai commencé à peindre dans la rue, à faire des graffs et puis je me suis rendu compte que je voulais devenir un artiste « sérieux ». Tu sais, petit, j’étais toujours fourré dans les musées, je séchais les cours pour aller au musée et puis j’ai tilté.

DWT : De là, tu fais tes premiers pas dans l’art via la peinture ?
Fab Five Freddy : Oui, j’ai été l’un des premiers à venir du graffiti pour arriver dans le monde de l’art et à faire des expos dans des galeries et dans plein d’autres endroits. J’ai commencé à peindre dans la rue, à faire des graffs et puis je me suis rendu compte que je voulais devenir un artiste « sérieux ». Tu sais, petit, j’étais toujours fourré dans les musées, je séchais les cours pour aller au musée et puis j’ai tilté. Les artistes pop étaient inspirés par les mêmes choses que les graffeurs : les cartoons, la pub, et j’ai réalisé qu’il existait un lien et que je voulais développer ce lien en tant qu’artiste.

DWT : Parles nous de ton arrivée dans le crew mythique The Fabulous 5, au coté du légendaire Lee Quiñones ?
Fab Five Freddy : En fait, je n’ai pas participé à ce que The Fabulous 5 avait réalisé sur les trains, je suis arrivé vers la fin mais j’avais dans l’idée d’amener tout ça à un autre niveau : dans le monde de l’art. J’ai rencontré Lee qui a parlé de moi à certains des membres d’origine, et c’est eux qui m’ont proposé d’en faire partie. Au début, c’était surtout Lee et moi qui avons aidé à développer tout ça dans le monde de l’art.

DWT : Tu côtoies par la suite des artistes comme Andy Warhol, Jean-Michel Basquiat, Futura 2000, Rammellzee, Keith Haring, Kenny Scharf ! N’est-ce pas incroyable pour un petit gars venu de Brooklyn ?
Fab Five Freddy : Bien sûr, oui c’était cool. J’ai rencontré Jean-Michel à ses débuts, on essayait tous les deux de faire des choses similaires, on est devenu très proches et on partageait les mêmes idées sur la pop culture et sur une certaine manière d’intégrer ce mouvement. Puis, plus tard, nous avons rencontré Warhol, il était une véritable source d’inspiration pour plein d’artistes, et le fait qu’il aime beaucoup notre travail, ça nous a encouragé dans l’idée qu’on avait raison, qu’on était dans le vrai. On commençait à se faire un nom dans le New York underground alors le fait que des gens comme lui, qu’on admirait, apprécie notre travail, c’était encourageant, ça prouvait qu’on avait raison. Il savait que j’avais peint un train de boîte de soupes, que c’était un hommage envers lui et son travail. C’était aussi un message adressé aux autres graffeurs pour leur dire qu’on pouvait peindre sur autre chose que sur des trains, qu’on pouvait y mettre autre chose que son nom. L’idée c’était d’inspirer d’autres graffeurs et de montrer aux gens du milieu de l’art, qu’on connaissait l’art moderne, ou du moins certains d’entre nous comme moi ! (rires)

C’était aussi un message adressé aux autres graffeurs pour leur dire qu’on pouvait peindre sur autre chose que sur des trains, qu’on pouvait y mettre autre chose que son nom.

DWT : Qui est le premier français que tu rencontres dans le milieu hip hop ?
Fab Five Freddy : En fait, je n’ai pas rencontré de français dans le hip hop ! L’histoire intéressante qui est liée à « comment le hip hop a commencé en France », je crois que c’est quand j’ai rencontré François Bizot à Paris en 1980… Je venais de Milan avec Lee où avaient lieu les premières expositions sérieuses de nos peintures, à Rome puis à Milan en Italie, et je suis allé pour la première fois à Paris et j’ai rencontré Bizot. L’un des membres d’un nouveau groupe de new wave les Talking Heads, David Byrne, m’a présenté Bizot et lui a dit que j’étais en train d’initier cette nouvelle culture à New York. Bizot a voulu me rencontrer, je suis allé dans les bureaux du magazine Actuel et il m’a dit « je vais envoyer un groupe de journalistes à New York pour écrire un grand article sur tout ce qui se passe et je t’envoie quelqu’un pour écrire spécialement sur toi ». Et cette fille Elisabeth D est venue et je l’ai emmené dans le Bronx, dans mon art, dans mon studio, et chez mon autre ami Keith Haring. Elle a écrit un grand article, et cet article a permis aux gens en France de connaître cette culture. Le mec qui écrivait pour Actuel à New York, s’appelait donc Bernard Zekri, il a aidé à coordonner tout ça. Nous sommes devenus de bons amis. Il pensait que je devais faire un disque en français… Tu sais j’avais pas d’argent à l’époque et je n’étais pas un rappeur. Je pouvais rapper mais je n’essayais pas d’en être un. Il m’a dit « mec, on pourrait faire un disque, je connais un label qui pourrait produire, je pourrai t’apprendre à rapper en français ». Je trouvais cette idée folle mais je me suis dis « ok essayons« . J’avais besoin de me faire quelques dollars pour payer mon loyer, je ne me faisais pas d’argent encore, et j’ai fait ce disque qui est devenu « Change the Beat ». Le mec du label était super excité car il voyait que des choses commençaient à se passer à New York, que la presse commençait à s’intéresser à ce qu’on faisait, et il a voulu sortir plusieurs disques. Il a appelé Futura, DST, Phase 2 et un autre mec (ndlr : The Smurfs), il y a eu 5 autres disques avec le mien. Mon disque a fait démarrer le projet et la maison de disque a décidé de sortir une série de ces disques. Puis Bernard Zekri a rassemblé tous les disques des autres artistes et a organisé une tournée en 1982 et nous avons parcouru la France.

Mon disque a fait démarrer le projet et la maison de disque a décidé de sortir une série de ces disques. Puis Bernard Zekri a rassemblé tous les disques des autres artistes et a organisé une tournée en 1982 et nous avons parcouru la France.

Au début, il y avait moi, Bambaataa, le Rock Steady Crew, plus de trente personne qui voyage en France pour faire ce qui est devenu le premier show hip hop en Europe, DJ, Scratching, du graffiti sur scène, du breakdance et tout ça en même temps. Les français venaient partout où on allait et ils regardaient, ils apprenaient et juste après ça a commencé à se développer en France. On n’a jamais pensé que ça allait prendre cette tournure, lorsqu’on regarde en arrière, c’est une très belle chose d’avoir développé cette culture et de l’avoir montré aux français qui ont dit « ok, on va plonger là-dedans et en faire notre propre version ». Et puis, Bernard est devenu quelqu’un d’important dans les médias en France, à Canal + et tous ces gros trucs.

Fab 5 Freddy - Change the beat - Celluloid - DWT Magazine - Down With This

DWT : Tu les as inspiré mais as-tu conscience d’avoir évangélisé la jeunesse française au hip hop lors de la tournée New York City Rap en 1982 ?
Fab Five Freddy : Je ne me rendais compte de rien, c’est bien plus tard, lorsque j’ai vu qu’ils étaient à fond ! Au début, je me suis dit on va aller en France, on va s’amuser, les gens ne comprenaient pas notre anglais mais ils aimaient l’attitude, l’énergie, voir des noirs, des portoricains, des gens de couleurs sur scène avec une attitude de la rue qu’ils n’avaient jamais vu avant. Ils comprenaient bien plus que ce que l’on pensait et c’est là qu’on a compris. Puis ça s’est développé très vite et on savait qu’ils s’étaient inspirés de tout ça car la culture a vraiment émergé.

Les gens en France étaient très ouverts, réceptifs, intéressés par ce que l’on faisait.  C’était très excitant car ça n’avait même pas encore commencé à devenir important en Amérique !

DWT : Quel regard as-tu sur la France et sur Paris plus particulièrement ?
Fab Five Freddy : C’était cool, c’était Paris : marrant, génial ! Les gens étaient très ouverts, réceptifs, intéressés par ce que l’on faisait.  C’était très excitant car ça n’avait même pas encore commencé à devenir important en Amérique ! Les gens en France et dans d’autres endroits en Europe comme l’Angleterre, Amsterdam étaient très très excités, bien plus que l’Amérique l’était je dois dire. Le hip hop à l’époque était juste un phénomène à New York : cette culture ne s’était pas encore développé dans tout le pays. La France s’y est intéressée plus sérieusement parce qu’il y avait moins de racisme, ou un type de racisme différent qu’en Amérique. C’était très bien.

DWT : Quelle image gardes-tu de cette tournée ?
Fab Five Freddy : Je ne sais pas s’il y a un souvenir marquant. Le fait de le faire, que les gens aient aimé… On savait qu’ils ne comprenaient pas ce qu’on racontait mais ils captaient quand même le rythme, la force, l’attitude. C’était juste marrant d’être à Paris, j’étais le seul à y être déjà venu (ndlr : on corrige car Mr Freeze RSC y avait déjà mis plus que les pieds…) et tu sais, il y avait un bel accueil, on a rencontré des gens très cools, les gens étaient très gentils avec nous. On a été aux Bains Douches, qui était un club très en vogue à cette époque, ou dans une autre grosse boîte, Le Palace. Il y avait des gens formidables partout, c’est ce dont je me souviens. C’était cool, on nous traitait bien.

DWT : Parle-nous également de Sophie Bramly et du travail de photos qu’elle avait si bien mené à vos côtés…
Fab Five Freddy : Et bien Sophie trainait à New York, elle était amie avec Bernard, donc je la voyais pas mal dans différentes fêtes, et comme nous démarrions l’aventure à New York, elle était là tout le temps. Elle était super, pleine d’énergie, prenant des photos, tout le monde aimait bien Sophie donc elle a vraiment traîné avec nous. Je crois qu’aucun journaliste américain n’a fait partie de la culture comme elle. Elle observait tout cela très sérieusement et ses photos montrent qu’elle comprenait que c’était spécial, intéressant. Elle était brillante, elle était vraiment en avance par rapport à plein de gens en Amérique. Elle savait capturer ces moments et elle était aussi l’exemple incarné de la manière dont les français nous traitaient, ils étaient ouverts et intéressés par cette nouvelle culture. Les américains n’avaient pas encore compris que quelque chose de puissant était en train de se produire.

Beaucoup d’artistes de cette époque, qui sont devenus énormes comme Tupac, Snoop, ont fait leur première grande interview avec moi sur MTV.

DWT : Beaucoup de monde aurait voulu être à ta place à l’époque de « Yo ! MTV Raps », tu connais tout le monde dans le hip hop et tu as parcouru la terre entière grâce à lui. Quel est ton meilleur et ton pire souvenir de cette époque ?
Fab Five Freddy : Oh man ! Le meilleur c’était de rencontrer des artistes différents dans différents endroits où je n’avais jamais été. Je pouvais rencontrer ces nouvelles personnes et leur poser des questions, un peu comme ce que tu fais avec moi. Savoir comment tu es arrivé là-dedans, qu’est-ce qui t’inspire, tout le monde a une méthode différente et une histoire différente. Le grand souvenir est que c’était cool de rencontrer ces nouvelles personnes partout où j’allais ! Beaucoup d’artistes de cette époque, qui sont devenus énormes comme Tupac, Snoop, ont fait leur première grande interview avec moi sur MTV parce que c’était la seule émission qui les montrait à travers le pays et le monde, donc c’était un truc très spécial tu sais. Le pire souvenir ? Je ne peux pas penser à un pire souvenir, je ne les garde pas en tête, j’avance.

DWT : Vous aviez reçu notamment le groupe IAM et MC SOLAAR et son DJ Jimmy Jay. Que pensais-tu à l’époque de « Yo ! MTV Raps » du niveau de la scène rap en France ?
Fab Five Freddy : J’ai interviewé MC Solaar et j’ai réalisé le clip du titre de Guru avec MC Solaar « Le Bien, le Mal » à Paris. Je pensais que c’était génial qu’ils en soient là, de voir les français s’impliquer dans la culture, faire leur propre truc, c’était parfait.

Ils m’ont emmené dans un magasin qui s’appelait Ticaret, les mecs de la boutique étaient venus voir le premier « New York City Rap Tour » ! Ils m’avaient expliqué comment ils sont sortis du show, comment ils avaient été inspiré et développé la culture hip hop en France.

DWT : Parle-nous plus particulièrement de l’ambiance du tournage de ce clip ?
Fab Five Freddy : Bien, marrant. Je faisais mon truc. C’était super. Tout était super. En gros me voilà de retour à Paris 10 ou 12 ans plus tard et en préparant ce clip et je pouvais voir à quel point le hip hop avait grandi. Ils m’ont emmené dans un magasin qui s’appelait Ticaret, les mecs de la boutique (ndlr : Dan notamment) étaient venus voir le premier « New York City Rap Tour » ! Ils ont été influencés à ce moment-là et ont développé ce qu’ils faisaient. Ils m’avaient expliqué comment ils sont sortis du show, comment ils avaient été inspiré et développé la culture hip hop en France. J’étais halluciné d’écouter cette histoire et de rencontrer tous ces gens différents !

DWT : Es-tu toujours proche de la Zulu Nation et de ses valeurs ?
Fab Five Freddy : Je ne dirais pas proche, je veux dire que j’adore ce qu’ils font, Bambaataa est un bon ami mais je suis juste content que ça continue, que ça donne aux gens une identité, que ça aide les gens à regarder l’Afrique d’une manière forte et progressive. A cause du racisme en Amérique, beaucoup de gens ont appris à mépriser l’Afrique, car l’Afrique avait été abusée par de nombreux pays européens. Ce pays est construit sur le travail des esclaves et les esclaves venaient d’Afrique donc c’est intéressant de connaître toute cette histoire et que des gens aident les jeunes à voir l’Afrique d’une nouvelle manière avec le Zulu Nation. Tout le concept qui a inspiré tout cela est une bonne chose, une très bonne chose.

DWT : Avec du recul, penses-tu que d’importer la culture hip hop du Bronx dans les night clubs de downtown New York via le Negril et le Roxy a été bénéfique pour l’évolution de la culture et de ses activistes ?
Fab Five Freddy : Qu’est ce que tu en penses ?

DWT : Je pense que ça l’était !
Fab Five Freddy : C’est clair, tu as raison ! C’est évident !

DWT : En étais-tu conscient à l’époque ?
Fab Five Freddy : Je l’étais ! J’étais très conscient de ce que j’essayais de faire, d’amener, et en dehors des gens qui y participaient, personne ne considérait cela sérieusement. Pour moi, c’était très sérieux et il fallait le médiatiser, le présenter à d’autres gens pour trouver plus de soutiens. C’est une des choses que j’ai faite aussi pour aider les gens à comprendre mon propre travail et qui j’étais. En Amérique, on véhiculait une image très négative et aussi très raciste de New York, et je voulais créer une perception plus forte, une image claire, précise. C’est aussi ce qui m’a motivé à faire ce qui a conduit au premier film hip hop Wild Style, montrer ce que nous faisions vraiment afin que les gens puissent mieux comprendre ce que c’était.

Beat Street n’est pas considéré comme le film classique de cette période, Wild Style l’est. Beat Street a servi de vitrine à plein de gens auprès d’un large public, il arrive après que tout ait été dit et fait, si tu veux voir la réalité : tu regardes Wild Style.

DWT : Tu viens d’évoquer Wild Style, quelle différence fondamentale fais-tu entre un film comme Beat Street et Wild Style dans lequel tu as joué ?
Fab Five Freddy : On ne pas comparer. Wild Style a été fait par de vraies personnes de la scène. Beat Street a essayé de faire une version hollywoodienne à gros budget de ce que nous avions déjà fait. Tu sais Beat Street n’est pas considéré comme le film classique de cette période, Wild Style l’est. Beat Street a servi de vitrine à plein de gens auprès d’un large public, il arrive après que tout ait été dit et fait, si tu veux voir la réalité : tu regardes Wild Style. Dans ce film, tu peux facilement sentir à quel point c’est vrai. Et c’est-ce que nous voulions faire depuis le début : nous voulions faire quelque chose qui était aussi réel que nous.

DWT : En France, tu es perçu comme étant le mec le plus « cool » de New York, tu en as conscience ?
Fab Five Freddy : Non pas vraiment. Pas dans ce sens. C’est gentil, je suis flatté mais il y a plein de gens qui sont cools…S’ils comprennent les choses que j’ai faites pour que les gens connaissent la culture, si c’est considéré comme étant cool alors je le prends bien parce que je voulais que les gens nous voient avec une lumière différente. Il faut comprendre que toute la communication qui était faite autour des graffeurs était très négative, parce que c’était des noirs et des portoricains en majorité qui graffaient, il y avait des blancs aussi mais ils nous voyaient comme l’une des pires choses qui arrivait sans comprendre qu’il y avait de la créativité. J’ai aidé à montrer cela et c’est ce dont je suis le plus fier, dons si ça c’est être cool, alors je prends !

DWT : La peinture, le rap, la photo, l’écriture, le journalisme, le réalisation… finalement, tu sais presque tout faire. Où pouvons nous voir ton travail, notamment tes toiles ?
Fab Five Freddy : Je ne suis pas un rappeur, mais j’ai rappé parfois, il y a des années. Comprends bien, je ne suis pas un rappeur bien que je sois un grand fan. Je suis un artiste, un réalisateur et j’ai aussi fait des trucs face caméra mais les choses principales que je fais : ce sont des peintures. Mais comme je te dis, j’ai participé aussi à de grands projets cinématographiques et télévisuels. Je n’ai pas de galerie à Paris qui me représente pour le moment mais j’espère que ça sera bientôt le cas pour qu’on puisse voir mon travail.

Il faut comprendre que toute la communication qui était faite autour des graffeurs était très négative, parce que c’était des noirs et des portoricains en majorité qui graffaient, il y avait des blancs aussi mais ils nous voyaient comme l’une des pires choses qui arrivait sans comprendre qu’il y avait de la créativité.

DWT : Un petit mot pour la scène hip hop française ?
Fab Five Freddy : Oui je peux dire plein de trucs. Je pense que la chose la plus importante sur le hip hop en France, c’est que ça a donné une voix aux noirs, aux maghrébins, aux gens pauvres. Une voix que les jeunes n’avaient pas aussi. Ils n’avaient pas de moyen d’exprimer ce qui se passait réellement. Tu sais, j’étais à paris il y a quelques semaines, j’ai dîné avec Lucien et Matthieu Kassovitz, le réalisateur de la Haine chez Sophie et on a parlé de l’histoire du hip hop en France, on a parlé de ce qui se passe en Amérique en ce moment avec les noirs. C’était une super conversation qui m’a montré que plein de gens du hip hop en France, à Paris, sont très conscients des luttes que nous avons encore ici en Amérique et je suis conscient comme beaucoup d’autres des luttes que les gens de couleurs doivent affronter ici. La combat continue et j’ai été content de parler avec des gens qui connaissent bien cette histoire depuis ses débuts, des problèmes qui persistent dans les banlieues. Avec tout ce qui se passe, le hip hop est encore la voix des jeunes.

DWT : As-tu vu la Haine de Mathieu Kassovitz ? Qu’en as tu pensé ?
Fab Five Freddy : Oui bien sur je l’ai vu ! J’ai été impressionné, c’est un film génial, ça m’a montré ce qu’il se passait vraiment dans les banlieues. Ça m’a aidé à comprendre d’où venait la vraie énergie rap / hip hop de France, de ces gens qui vivent en dehors de la ville de la culture, c’est très fascinant. Tu sais en Amérique, quand tu dis banlieue, c’est une chose différente, ça veut dire que tu as une jolie maison, que tu as réussi. En France, quand tu vas en banlieue tu te dis que c’est ici le ghetto, c’est ce que ce film nous a appris pour nous. En général, quand je venais à Paris, je n’allais pas dans les banlieues pour voir où les vrais gens habitaient. On m’en parlait mais je ne comprenais pas vraiment. Puis j’ai appris ce que la banlieue voulait vraiment dire et le film de Matthieu a été très important pour cela.

DWT : Et pour finir en 2015, « Fab 5 Freddy told me everybody’s fly » ?
Fab Five Freddy : Ok. Tu veux parler du disque de Blondie ? Ca a été la manière de Blondie de s’imprégner de plein de choses que je lui apprenais sur la culture, je lui disais qu’il y avait des mecs fly, des filles fly, flash est le DJ le plus rapide et ça a été sa manière d’intégrer plusieurs choses que je lui enseignais, et d’en faire un disque. Oui, je pense que je lui ai vraiment dit ça, dans le monde du hip hop, c’était le genre d’argot qu’on utilisait. Etre fly, ça voulait dire que tu avais le bon style, que tu comprenais ce qu’il se passait dans la culture hip hop à cette époque.

J’ai grandi en sachant, que les gens en France et dans d’autres pays en Europe, traitaient les musiciens de jazz bien mieux qu’en Amérique. J’étais conscient de cela et j’ai été très heureux de faire partie du mouvement qui a étendu cette culture en France.

DWT : Merci beaucoup pour l’interview, c’était très cool…
Fab Five Freddy : De rien ! Comme je te l’ai dit j’ai toujours eu un lien très fort avec les gens en France, j’ai tant appris. Une partie de mes racines vient du jazz, mon père était un ami intime de Max Roach qui était un batteur de jazz très important dans les années 1950. J’ai grandi en sachant, que les gens en France et dans d’autres pays en Europe, traitaient les musiciens de jazz bien mieux qu’en Amérique. J’étais conscient de cela et j’ai été très heureux de faire partie du mouvement qui a étendu cette culture en France. Les gens nous traitaient de la même manière que les musiciens de jazz, avec plein d’amour, de compréhension, et ça dès les débuts, il n’y avait pas le racisme et l’ignorance que les gens de cette culture ont dû gérer en Amérique. Même si j’ai remarqué des problèmes en France, les français ou beaucoup d’entre eux comprennent très bien la créativité, et c’est génial. Le meilleur reste à venir, j’en suis sûr. Les gens sont inspirés et vont vers de nouveaux moyens d’expression avec cette culture.

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