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Fab Five Freddy les bons tuyaux

L’histoire intéressante qui est liée à « comment le hip hop a commencé en France », je crois que c’est quand j’ai rencontré François Bizot à Paris en 1980…

Fab Five Freddy - Exclu Down With This - DWT Magazine

Fab Five Freddy – Photo D.R.

On y est : l’un des plus anciens activistes du hip hop a accepté de répondre en exclusivité aux questions du plus ancien média hip hop de France ! Quoi de plus étonnant finalement puisque DWT, c’est définitivement le média le plus funky de France, qui continue de glisser sur la tête des « journalistes du hip hop » en place ! Véritable touche à tout artistique, original de chez original, old timer de chez old timer, ami du tout New York puis de l’ensemble du mouvement hip hop mondial qu’il a vu naître et exploser, notre hôte du mois est aussi « le journaliste » qui a rencontré la totalité des plus grands représentants de notre culture lors de ses célèbres interviews. Un peu comme nous en somme (rires). A la différence près que ce dernier est nettement plus intéressant que les 3/4 des rappeurs français réunis ! Voici donc le bien nommé, l’inégalable, l’ineffable, le fabuleux, Fab5 Freddy himself ! Qui n’a pas attendu son épopée journalistique chaque semaine sur « Yo ! MTV Raps » ?! Ses interviews improbables dans le vrai « terter » du hip hop, entre le Bronx et Compton mais aussi de part le monde : Japon, Allemagne ou même la France qu’il connait très bien. Nous aurions pu échanger toute la nuit sur les anecdotes qui ont jalonnées sa vie. L’homme qui a côtoyé et signé les interviews de toutes les vraies légendes du hip hop, voir même leurs clips, nous répond enfin. C’est définitivement pour vous et avec honneur sur DWT MAG.

Down With This : Tu es né à Brooklyn en 1959, quel genre de quartier était Brooklyn à l’époque ?
Fab Five Freddy : Brooklyn a toujours été un quartier ouvrier, de classe moyenne.

J’ai commencé à peindre dans la rue, à faire des graffs et puis je me suis rendu compte que je voulais devenir un artiste « sérieux ». Tu sais, petit, j’étais toujours fourré dans les musées, je séchais les cours pour aller au musée et puis j’ai tilté.

DWT : De là, tu fais tes premiers pas dans l’art via la peinture ?
Fab Five Freddy : Oui, j’ai été l’un des premiers à venir du graffiti pour arriver dans le monde de l’art et à faire des expos dans des galeries et dans plein d’autres endroits. J’ai commencé à peindre dans la rue, à faire des graffs et puis je me suis rendu compte que je voulais devenir un artiste « sérieux ». Tu sais, petit, j’étais toujours fourré dans les musées, je séchais les cours pour aller au musée et puis j’ai tilté. Les artistes pop étaient inspirés par les mêmes choses que les graffeurs : les cartoons, la pub, et j’ai réalisé qu’il existait un lien et que je voulais développer ce lien en tant qu’artiste.

DWT : Parles nous de ton arrivée dans le crew mythique The Fabulous 5, au coté du légendaire Lee Quiñones ?
Fab Five Freddy : En fait, je n’ai pas participé à ce que The Fabulous 5 avait réalisé sur les trains, je suis arrivé vers la fin mais j’avais dans l’idée d’amener tout ça à un autre niveau : dans le monde de l’art. J’ai rencontré Lee qui a parlé de moi à certains des membres d’origine, et c’est eux qui m’ont proposé d’en faire partie. Au début, c’était surtout Lee et moi qui avons aidé à développer tout ça dans le monde de l’art.

DWT : Tu côtoies par la suite des artistes comme Andy Warhol, Jean-Michel Basquiat, Futura 2000, Rammellzee, Keith Haring, Kenny Scharf ! N’est-ce pas incroyable pour un petit gars venu de Brooklyn ?
Fab Five Freddy : Bien sûr, oui c’était cool. J’ai rencontré Jean-Michel à ses débuts, on essayait tous les deux de faire des choses similaires, on est devenu très proches et on partageait les mêmes idées sur la pop culture et sur une certaine manière d’intégrer ce mouvement. Puis, plus tard, nous avons rencontré Warhol, il était une véritable source d’inspiration pour plein d’artistes, et le fait qu’il aime beaucoup notre travail, ça nous a encouragé dans l’idée qu’on avait raison, qu’on était dans le vrai. On commençait à se faire un nom dans le New York underground alors le fait que des gens comme lui, qu’on admirait, apprécie notre travail, c’était encourageant, ça prouvait qu’on avait raison. Il savait que j’avais peint un train de boîte de soupes, que c’était un hommage envers lui et son travail. C’était aussi un message adressé aux autres graffeurs pour leur dire qu’on pouvait peindre sur autre chose que sur des trains, qu’on pouvait y mettre autre chose que son nom. L’idée c’était d’inspirer d’autres graffeurs et de montrer aux gens du milieu de l’art, qu’on connaissait l’art moderne, ou du moins certains d’entre nous comme moi ! (rires)

C’était aussi un message adressé aux autres graffeurs pour leur dire qu’on pouvait peindre sur autre chose que sur des trains, qu’on pouvait y mettre autre chose que son nom.

DWT : Qui est le premier français que tu rencontres dans le milieu hip hop ?
Fab Five Freddy : En fait, je n’ai pas rencontré de français dans le hip hop ! L’histoire intéressante qui est liée à « comment le hip hop a commencé en France », je crois que c’est quand j’ai rencontré François Bizot à Paris en 1980… Je venais de Milan avec Lee où avaient lieu les premières expositions sérieuses de nos peintures, à Rome puis à Milan en Italie, et je suis allé pour la première fois à Paris et j’ai rencontré Bizot. L’un des membres d’un nouveau groupe de new wave les Talking Heads, David Byrne, m’a présenté Bizot et lui a dit que j’étais en train d’initier cette nouvelle culture à New York. Bizot a voulu me rencontrer, je suis allé dans les bureaux du magazine Actuel et il m’a dit « je vais envoyer un groupe de journalistes à New York pour écrire un grand article sur tout ce qui se passe et je t’envoie quelqu’un pour écrire spécialement sur toi ». Et cette fille Elisabeth D est venue et je l’ai emmené dans le Bronx, dans mon art, dans mon studio, et chez mon autre ami Keith Haring. Elle a écrit un grand article, et cet article a permis aux gens en France de connaître cette culture. Le mec qui écrivait pour Actuel à New York, s’appelait donc Bernard Zekri, il a aidé à coordonner tout ça. Nous sommes devenus de bons amis. Il pensait que je devais faire un disque en français… Tu sais j’avais pas d’argent à l’époque et je n’étais pas un rappeur. Je pouvais rapper mais je n’essayais pas d’en être un. Il m’a dit « mec, on pourrait faire un disque, je connais un label qui pourrait produire, je pourrai t’apprendre à rapper en français ». Je trouvais cette idée folle mais je me suis dis « ok essayons« . J’avais besoin de me faire quelques dollars pour payer mon loyer, je ne me faisais pas d’argent encore, et j’ai fait ce disque qui est devenu « Change the Beat ». Le mec du label était super excité car il voyait que des choses commençaient à se passer à New York, que la presse commençait à s’intéresser à ce qu’on faisait, et il a voulu sortir plusieurs disques. Il a appelé Futura, DST, Phase 2 et un autre mec (ndlr : The Smurfs), il y a eu 5 autres disques avec le mien. Mon disque a fait démarrer le projet et la maison de disque a décidé de sortir une série de ces disques. Puis Bernard Zekri a rassemblé tous les disques des autres artistes et a organisé une tournée en 1982 et nous avons parcouru la France.

Mon disque a fait démarrer le projet et la maison de disque a décidé de sortir une série de ces disques. Puis Bernard Zekri a rassemblé tous les disques des autres artistes et a organisé une tournée en 1982 et nous avons parcouru la France.

Au début, il y avait moi, Bambaataa, le Rock Steady Crew, plus de trente personne qui voyage en France pour faire ce qui est devenu le premier show hip hop en Europe, DJ, Scratching, du graffiti sur scène, du breakdance et tout ça en même temps. Les français venaient partout où on allait et ils regardaient, ils apprenaient et juste après ça a commencé à se développer en France. On n’a jamais pensé que ça allait prendre cette tournure, lorsqu’on regarde en arrière, c’est une très belle chose d’avoir développé cette culture et de l’avoir montré aux français qui ont dit « ok, on va plonger là-dedans et en faire notre propre version ». Et puis, Bernard est devenu quelqu’un d’important dans les médias en France, à Canal + et tous ces gros trucs.

Fab 5 Freddy - Change the beat - Celluloid - DWT Magazine - Down With This

DWT : Tu les as inspiré mais as-tu conscience d’avoir évangélisé la jeunesse française au hip hop lors de la tournée New York City Rap en 1982 ?
Fab Five Freddy : Je ne me rendais compte de rien, c’est bien plus tard, lorsque j’ai vu qu’ils étaient à fond ! Au début, je me suis dit on va aller en France, on va s’amuser, les gens ne comprenaient pas notre anglais mais ils aimaient l’attitude, l’énergie, voir des noirs, des portoricains, des gens de couleurs sur scène avec une attitude de la rue qu’ils n’avaient jamais vu avant. Ils comprenaient bien plus que ce que l’on pensait et c’est là qu’on a compris. Puis ça s’est développé très vite et on savait qu’ils s’étaient inspirés de tout ça car la culture a vraiment émergé.

Les gens en France étaient très ouverts, réceptifs, intéressés par ce que l’on faisait.  C’était très excitant car ça n’avait même pas encore commencé à devenir important en Amérique !

DWT : Quel regard as-tu sur la France et sur Paris plus particulièrement ?
Fab Five Freddy : C’était cool, c’était Paris : marrant, génial ! Les gens étaient très ouverts, réceptifs, intéressés par ce que l’on faisait.  C’était très excitant car ça n’avait même pas encore commencé à devenir important en Amérique ! Les gens en France et dans d’autres endroits en Europe comme l’Angleterre, Amsterdam étaient très très excités, bien plus que l’Amérique l’était je dois dire. Le hip hop à l’époque était juste un phénomène à New York : cette culture ne s’était pas encore développé dans tout le pays. La France s’y est intéressée plus sérieusement parce qu’il y avait moins de racisme, ou un type de racisme différent qu’en Amérique. C’était très bien.

DWT : Quelle image gardes-tu de cette tournée ?
Fab Five Freddy : Je ne sais pas s’il y a un souvenir marquant. Le fait de le faire, que les gens aient aimé… On savait qu’ils ne comprenaient pas ce qu’on racontait mais ils captaient quand même le rythme, la force, l’attitude. C’était juste marrant d’être à Paris, j’étais le seul à y être déjà venu (ndlr : on corrige car Mr Freeze RSC y avait déjà mis plus que les pieds…) et tu sais, il y avait un bel accueil, on a rencontré des gens très cools, les gens étaient très gentils avec nous. On a été aux Bains Douches, qui était un club très en vogue à cette époque, ou dans une autre grosse boîte, Le Palace. Il y avait des gens formidables partout, c’est ce dont je me souviens. C’était cool, on nous traitait bien.

DWT : Parle-nous également de Sophie Bramly et du travail de photos qu’elle avait si bien mené à vos côtés…
Fab Five Freddy : Et bien Sophie trainait à New York, elle était amie avec Bernard, donc je la voyais pas mal dans différentes fêtes, et comme nous démarrions l’aventure à New York, elle était là tout le temps. Elle était super, pleine d’énergie, prenant des photos, tout le monde aimait bien Sophie donc elle a vraiment traîné avec nous. Je crois qu’aucun journaliste américain n’a fait partie de la culture comme elle. Elle observait tout cela très sérieusement et ses photos montrent qu’elle comprenait que c’était spécial, intéressant. Elle était brillante, elle était vraiment en avance par rapport à plein de gens en Amérique. Elle savait capturer ces moments et elle était aussi l’exemple incarné de la manière dont les français nous traitaient, ils étaient ouverts et intéressés par cette nouvelle culture. Les américains n’avaient pas encore compris que quelque chose de puissant était en train de se produire.

Beaucoup d’artistes de cette époque, qui sont devenus énormes comme Tupac, Snoop, ont fait leur première grande interview avec moi sur MTV.

DWT : Beaucoup de monde aurait voulu être à ta place à l’époque de « Yo ! MTV Raps », tu connais tout le monde dans le hip hop et tu as parcouru la terre entière grâce à lui. Quel est ton meilleur et ton pire souvenir de cette époque ?
Fab Five Freddy : Oh man ! Le meilleur c’était de rencontrer des artistes différents dans différents endroits où je n’avais jamais été. Je pouvais rencontrer ces nouvelles personnes et leur poser des questions, un peu comme ce que tu fais avec moi. Savoir comment tu es arrivé là-dedans, qu’est-ce qui t’inspire, tout le monde a une méthode différente et une histoire différente. Le grand souvenir est que c’était cool de rencontrer ces nouvelles personnes partout où j’allais ! Beaucoup d’artistes de cette époque, qui sont devenus énormes comme Tupac, Snoop, ont fait leur première grande interview avec moi sur MTV parce que c’était la seule émission qui les montrait à travers le pays et le monde, donc c’était un truc très spécial tu sais. Le pire souvenir ? Je ne peux pas penser à un pire souvenir, je ne les garde pas en tête, j’avance.

DWT : Vous aviez reçu notamment le groupe IAM et MC SOLAAR et son DJ Jimmy Jay. Que pensais-tu à l’époque de « Yo ! MTV Raps » du niveau de la scène rap en France ?
Fab Five Freddy : J’ai interviewé MC Solaar et j’ai réalisé le clip du titre de Guru avec MC Solaar « Le Bien, le Mal » à Paris. Je pensais que c’était génial qu’ils en soient là, de voir les français s’impliquer dans la culture, faire leur propre truc, c’était parfait.

Ils m’ont emmené dans un magasin qui s’appelait Ticaret, les mecs de la boutique étaient venus voir le premier « New York City Rap Tour » ! Ils m’avaient expliqué comment ils sont sortis du show, comment ils avaient été inspiré et développé la culture hip hop en France.

DWT : Parle-nous plus particulièrement de l’ambiance du tournage de ce clip ?
Fab Five Freddy : Bien, marrant. Je faisais mon truc. C’était super. Tout était super. En gros me voilà de retour à Paris 10 ou 12 ans plus tard et en préparant ce clip et je pouvais voir à quel point le hip hop avait grandi. Ils m’ont emmené dans un magasin qui s’appelait Ticaret, les mecs de la boutique (ndlr : Dan notamment) étaient venus voir le premier « New York City Rap Tour » ! Ils ont été influencés à ce moment-là et ont développé ce qu’ils faisaient. Ils m’avaient expliqué comment ils sont sortis du show, comment ils avaient été inspiré et développé la culture hip hop en France. J’étais halluciné d’écouter cette histoire et de rencontrer tous ces gens différents !

DWT : Es-tu toujours proche de la Zulu Nation et de ses valeurs ?
Fab Five Freddy : Je ne dirais pas proche, je veux dire que j’adore ce qu’ils font, Bambaataa est un bon ami mais je suis juste content que ça continue, que ça donne aux gens une identité, que ça aide les gens à regarder l’Afrique d’une manière forte et progressive. A cause du racisme en Amérique, beaucoup de gens ont appris à mépriser l’Afrique, car l’Afrique avait été abusée par de nombreux pays européens. Ce pays est construit sur le travail des esclaves et les esclaves venaient d’Afrique donc c’est intéressant de connaître toute cette histoire et que des gens aident les jeunes à voir l’Afrique d’une nouvelle manière avec le Zulu Nation. Tout le concept qui a inspiré tout cela est une bonne chose, une très bonne chose.

DWT : Avec du recul, penses-tu que d’importer la culture hip hop du Bronx dans les night clubs de downtown New York via le Negril et le Roxy a été bénéfique pour l’évolution de la culture et de ses activistes ?
Fab Five Freddy : Qu’est ce que tu en penses ?

DWT : Je pense que ça l’était !
Fab Five Freddy : C’est clair, tu as raison ! C’est évident !

DWT : En étais-tu conscient à l’époque ?
Fab Five Freddy : Je l’étais ! J’étais très conscient de ce que j’essayais de faire, d’amener, et en dehors des gens qui y participaient, personne ne considérait cela sérieusement. Pour moi, c’était très sérieux et il fallait le médiatiser, le présenter à d’autres gens pour trouver plus de soutiens. C’est une des choses que j’ai faite aussi pour aider les gens à comprendre mon propre travail et qui j’étais. En Amérique, on véhiculait une image très négative et aussi très raciste de New York, et je voulais créer une perception plus forte, une image claire, précise. C’est aussi ce qui m’a motivé à faire ce qui a conduit au premier film hip hop Wild Style, montrer ce que nous faisions vraiment afin que les gens puissent mieux comprendre ce que c’était.

Beat Street n’est pas considéré comme le film classique de cette période, Wild Style l’est. Beat Street a servi de vitrine à plein de gens auprès d’un large public, il arrive après que tout ait été dit et fait, si tu veux voir la réalité : tu regardes Wild Style.

DWT : Tu viens d’évoquer Wild Style, quelle différence fondamentale fais-tu entre un film comme Beat Street et Wild Style dans lequel tu as joué ?
Fab Five Freddy : On ne pas comparer. Wild Style a été fait par de vraies personnes de la scène. Beat Street a essayé de faire une version hollywoodienne à gros budget de ce que nous avions déjà fait. Tu sais Beat Street n’est pas considéré comme le film classique de cette période, Wild Style l’est. Beat Street a servi de vitrine à plein de gens auprès d’un large public, il arrive après que tout ait été dit et fait, si tu veux voir la réalité : tu regardes Wild Style. Dans ce film, tu peux facilement sentir à quel point c’est vrai. Et c’est-ce que nous voulions faire depuis le début : nous voulions faire quelque chose qui était aussi réel que nous.

DWT : En France, tu es perçu comme étant le mec le plus « cool » de New York, tu en as conscience ?
Fab Five Freddy : Non pas vraiment. Pas dans ce sens. C’est gentil, je suis flatté mais il y a plein de gens qui sont cools…S’ils comprennent les choses que j’ai faites pour que les gens connaissent la culture, si c’est considéré comme étant cool alors je le prends bien parce que je voulais que les gens nous voient avec une lumière différente. Il faut comprendre que toute la communication qui était faite autour des graffeurs était très négative, parce que c’était des noirs et des portoricains en majorité qui graffaient, il y avait des blancs aussi mais ils nous voyaient comme l’une des pires choses qui arrivait sans comprendre qu’il y avait de la créativité. J’ai aidé à montrer cela et c’est ce dont je suis le plus fier, dons si ça c’est être cool, alors je prends !

DWT : La peinture, le rap, la photo, l’écriture, le journalisme, le réalisation… finalement, tu sais presque tout faire. Où pouvons nous voir ton travail, notamment tes toiles ?
Fab Five Freddy : Je ne suis pas un rappeur, mais j’ai rappé parfois, il y a des années. Comprends bien, je ne suis pas un rappeur bien que je sois un grand fan. Je suis un artiste, un réalisateur et j’ai aussi fait des trucs face caméra mais les choses principales que je fais : ce sont des peintures. Mais comme je te dis, j’ai participé aussi à de grands projets cinématographiques et télévisuels. Je n’ai pas de galerie à Paris qui me représente pour le moment mais j’espère que ça sera bientôt le cas pour qu’on puisse voir mon travail.

Il faut comprendre que toute la communication qui était faite autour des graffeurs était très négative, parce que c’était des noirs et des portoricains en majorité qui graffaient, il y avait des blancs aussi mais ils nous voyaient comme l’une des pires choses qui arrivait sans comprendre qu’il y avait de la créativité.

DWT : Un petit mot pour la scène hip hop française ?
Fab Five Freddy : Oui je peux dire plein de trucs. Je pense que la chose la plus importante sur le hip hop en France, c’est que ça a donné une voix aux noirs, aux maghrébins, aux gens pauvres. Une voix que les jeunes n’avaient pas aussi. Ils n’avaient pas de moyen d’exprimer ce qui se passait réellement. Tu sais, j’étais à paris il y a quelques semaines, j’ai dîné avec Lucien et Matthieu Kassovitz, le réalisateur de la Haine chez Sophie et on a parlé de l’histoire du hip hop en France, on a parlé de ce qui se passe en Amérique en ce moment avec les noirs. C’était une super conversation qui m’a montré que plein de gens du hip hop en France, à Paris, sont très conscients des luttes que nous avons encore ici en Amérique et je suis conscient comme beaucoup d’autres des luttes que les gens de couleurs doivent affronter ici. La combat continue et j’ai été content de parler avec des gens qui connaissent bien cette histoire depuis ses débuts, des problèmes qui persistent dans les banlieues. Avec tout ce qui se passe, le hip hop est encore la voix des jeunes.

DWT : As-tu vu la Haine de Mathieu Kassovitz ? Qu’en as tu pensé ?
Fab Five Freddy : Oui bien sur je l’ai vu ! J’ai été impressionné, c’est un film génial, ça m’a montré ce qu’il se passait vraiment dans les banlieues. Ça m’a aidé à comprendre d’où venait la vraie énergie rap / hip hop de France, de ces gens qui vivent en dehors de la ville de la culture, c’est très fascinant. Tu sais en Amérique, quand tu dis banlieue, c’est une chose différente, ça veut dire que tu as une jolie maison, que tu as réussi. En France, quand tu vas en banlieue tu te dis que c’est ici le ghetto, c’est ce que ce film nous a appris pour nous. En général, quand je venais à Paris, je n’allais pas dans les banlieues pour voir où les vrais gens habitaient. On m’en parlait mais je ne comprenais pas vraiment. Puis j’ai appris ce que la banlieue voulait vraiment dire et le film de Matthieu a été très important pour cela.

DWT : Et pour finir en 2015, « Fab 5 Freddy told me everybody’s fly » ?
Fab Five Freddy : Ok. Tu veux parler du disque de Blondie ? Ca a été la manière de Blondie de s’imprégner de plein de choses que je lui apprenais sur la culture, je lui disais qu’il y avait des mecs fly, des filles fly, flash est le DJ le plus rapide et ça a été sa manière d’intégrer plusieurs choses que je lui enseignais, et d’en faire un disque. Oui, je pense que je lui ai vraiment dit ça, dans le monde du hip hop, c’était le genre d’argot qu’on utilisait. Etre fly, ça voulait dire que tu avais le bon style, que tu comprenais ce qu’il se passait dans la culture hip hop à cette époque.

J’ai grandi en sachant, que les gens en France et dans d’autres pays en Europe, traitaient les musiciens de jazz bien mieux qu’en Amérique. J’étais conscient de cela et j’ai été très heureux de faire partie du mouvement qui a étendu cette culture en France.

DWT : Merci beaucoup pour l’interview, c’était très cool…
Fab Five Freddy : De rien ! Comme je te l’ai dit j’ai toujours eu un lien très fort avec les gens en France, j’ai tant appris. Une partie de mes racines vient du jazz, mon père était un ami intime de Max Roach qui était un batteur de jazz très important dans les années 1950. J’ai grandi en sachant, que les gens en France et dans d’autres pays en Europe, traitaient les musiciens de jazz bien mieux qu’en Amérique. J’étais conscient de cela et j’ai été très heureux de faire partie du mouvement qui a étendu cette culture en France. Les gens nous traitaient de la même manière que les musiciens de jazz, avec plein d’amour, de compréhension, et ça dès les débuts, il n’y avait pas le racisme et l’ignorance que les gens de cette culture ont dû gérer en Amérique. Même si j’ai remarqué des problèmes en France, les français ou beaucoup d’entre eux comprennent très bien la créativité, et c’est génial. Le meilleur reste à venir, j’en suis sûr. Les gens sont inspirés et vont vers de nouveaux moyens d’expression avec cette culture.

LandersSarrazin

Salut à tous les fans de hip-hop ! Je suis Landers Sarazzin, votre référence pour tout ce qui concerne le hip-hop. En tant qu'auteur et passionné fervent de ce genre électrisant, j'ai consacré ma vie à démêler les complexités, explorer les profondeurs et vibrer au rythme des beats qui définissent la culture hip-hop. J'ai découvert que ma véritable passion ne réside pas dans le fait de rapper mais d'écrire sur la musique qui nous émeut. E-mail / Instagram

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