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Interview Les 10 (1997)

Documents Flynt, L'Indis, Lavokato, Les 10'

Dans nos textes, on essaye de faire réfléchir les gens pour qu’ils s’intéressent plus aux problèmes de leurs voisins plutôt qu’aux valeurs matérielles, afin de les rendre plus humains, moins nombrilistes.

Down With This : Motivations – Débuts ?
Les 10’ : On s’est connu en 1976. On a vraiment kiffé le rap grâce au rap français parce qu’on comprenait les paroles. On a commencé à en écouter en 1987 avec l’émission, qui à l’époque n’était pas régulière, de Lionel D et Dee Nasty. C’était le vendredi. On avait douze ans, on écrivait pour s’amuser, c’était pas sérieux. On ne connaissait personne qui était dedans et on ne savait pas comment se fabriquer les instrumentaux. De toute façon, on n’avait pas d’argent pour investir. A cette époque, il y avait un petit groupe de personnes sur Bobigny qui était déjà dans le tag et le rap, mais ils étaient d’une autre génération, plus vieille (ndlr : dont MC Heims, plus tard Ménelik) mais on ne les connaissait pas. Par l’intermédiaire du tag, on en a connu certains. En 1990, le groupe SDAK nous a fait notre première instrumentale. Mais il n’y a pas eu de suite. C’est vraiment en 1993, lorsqu’on a pu créer nous-même nos musiques, qu’on s’est investi à fond dans les textes. C’est là qu’on a développé notre style.

DWT : Avez-vous des relations avec certains groupes issus de Bobigny ?
Les 10’ : Il est clair que sur Bobigny, tout le monde se connaît. On a connu la plupart des mecs des groupes de la scène actuelle avant qu’ils rappent, tels que Boss’Raw avec qui on a un peu taggué, Nakk (Soldafada), Primo (DonDon) et disudoc (du Damier) qui sont des amis d’enfance, ainsi que D’ et Djamal (Kabal). Sinon, dans les nouveaux groupes, on a des bons rapports avec eux, des groupes tels que Wildstyle et Apostonik. On connaît aussi les mecs du Damier.

DWT : Vous reconnaissez-vous dans le travail d’écriture de ces groupes ?
Les 10’ : En fait, il y a différents styles à Bobigny. Il y a par exemple le Krü Koncept (Kabal, Boss’Raw…) qui ont des textes au fond plus sociaux, réfléchis et travaillés, tandis que d’autres travaillent plus la forme et le style. Nous, on essaye de se placer au milieu et d’associer les deux : le fond / la forme, la phase / la phrase, le sens / le style. Parce qu’on pense que quand tu dis quelque chose, il y a des gens qui vont t’écouter, il faut alors faire attention aux paroles. Comme tu vis des trucs, dans un environnement difficile, qu’il t’arrive des galères à toi ou tes potes, tu te dois d’en parler, et le rap est ton seul moyen d’extériorisation. De plus, le rap est avant tout une musique, donc on a une exigence artistique. Plus ton débit, ton flow (ndlr : initialement écrit « flot » dans l’édition papier…) et ta musique attireront l’oreille, plus les gens chercheront à écouter ce qu’il y a derrière. On se doit de ne pas délaisser un des deux côtés. On travaille à fond cette homogénéité et cette adéquation entre le texte et la musique, pour faire passer un certain sentiment, une sensation et pour retranscrire une certaine atmosphère. Le rap vient de la rue. Nous aussi. Il est donc obligé qu’on parle du quotidien, de la vie d’ici. D’ailleurs la plupart des gens nous disent que nos morceaux ont l’air triste. Ce n’est pas volontaire, ni recherché, c’est peut-être tout simplement parce que la vie l’est. On reproduit, retranscrit notre environnement et je pense que c’est la vocation du rap, du vrai. Pour en revenir à la question, un autre groupe peut avoir le même discours que nous en venant d’une autre banlieue. Et le fait que l’on habite dans la même ville, apporte juste qu’on a grandi dans les mêmes endroits, qu’on a connu les mêmes ambiances. Après, c’est chacun sa vision.

Notre inspiration est la réalité, la vie au quotidien, mais on évite au maximum les clichés. On parle des temps qui changent et de l’effet qu’ont l’environnement, l’argent et la télé sur les gens.

DWT : Un rappeur connu, originaire de Bobigny, a eu pour refrain « Tout baigne » (… « même pour les gens qui se plaignent »). Evoluant dans la même ville, est-ce que vous considérez vous aussi que « Tout baigne » ?
Les 10’ : Il est évident que tout ne baigne pas. Si on vit dans nos ensembles de bétons de dix-huit étages, c’est qu’on est plus ou moins tous fils d’ouvriers et que l’on n’a pas les moyens financiers d’en partir. Comme toutes les banlieues, il y a un nombre important de gens dit « immigrés », que l’Etat délaisse quelque part et qui n’a pas accès au travail. Le manque d’argent, la difficulté à trouver un emploi, les échecs scolaires poussent beaucoup de monde à avoir beaucoup de monde à avoir recours à certains business illicites. Pas mal de jeunes ont donc déjà connu l’incarcération. Ici, les enfants voient leurs parents trimer tous les jours pour des salaires de misère. Ce genre de contraintes fait que les gens d’ici n’ont pas forcément eu une belle jeunesse, ni une belle vie après. On ne peut donc pas dire que tout va bien. Mais il faut situer le texte de Ménélik dans un certain contexte, dans un moment donné : une soirée, dans laquelle il y a tous ses potes, de charmantes femmes et tout ce qu’il faut pour passer un bon moment. Il a donc voulu dire que même si la vie n’est pas si belle, lorsque l’on sort en soirée, on essaye d’oublier ses problèmes et de s’amuser.

DWT : Le rap français semble être un rayon que vous connaissez depuis pas mal d’années. Comment percevez-vous son évolution ?
Les 10’ : Il évolue et a évolué de façon bizarre, par étapes. Il y a eu une première vague vers 1989/1990, dans laquelle les majors cherchaient chacune à avoir leurs rappeurs, qu’elles ont mis en avant. Ensuite, tout le reste a été médiatiquement mis de côté. Heureusement, beaucoup n’ont pas désespéré pour autant et certains ont compris qu’il ne fallait rien attendre des grandes maisons de disques. Ainsi, après Assassin, sont nés plusieurs auto-productions. Un réseau parallèle s’est créé : fanzines, émissions de radio, productions indépendantes et points de vente. Le rap a ainsi prouvé qu’il était autonome et n’avait besoin de personne, même si ses structures n’étaient pas tout à fait au point et l’unité pas tout à fait présente. Plus tard, les mêmes qui l’ont délaissé se sont re-penchés sur le phénomène. Cette nouvelle vague médiatique fait que l’on peut désormais voir du rap à la télé, en écouter à la radio. Cela dit, il n’y a qu’un côté qui est mis en avant, ce qui crée une forme de censure. On peut voir que ces deux dernières années, le nombre d’autoprods est croissant et que certains ont, grâce aux ventes, évolué et peuvent ainsi créer leurs studios. D’un coté plus stylistique, on peut voir que l’on se rapproche du rap ricain, qui jusque-là, avait pas mal d’années d’avance sur nous. Des productions tels que celles de Mehdi (ndlr : 2Mekslow, ndlr : paix à son âme), La Cliqua, IAM nous le prouvent. On peut aussi remarquer que chaque jour, le nombre de groupes s’accroît, mais beaucoup sont attirés par le côté « mode » et ignore le fond du truc. Ce qui est dommage aussi, c’est que de plus en plus de soirées partent en couilles…

On évite de se comporter en prof et de donner des conseils. On dit ce qu’on a à dire. Après, c’est à l’auditeur de se constituer sa propre opinion.

DWT : Quels sont principaux thèmes qui forment les textes de vos morceaux ?
Les 10’ : Comme on le disait précédemment, on est des chroniqueurs urbains. On relate juste ce qu’il se passe autour de nous. On crée en trois temps : observation / description et analyse / critique. Pour écrire un texte, je prends mon walkman avec la cassette de l’instru (ndlr : réalisée par Lavokato), je m’assois sur un banc en bas de mon bâtiment et je me laisse guider par l’atmosphère que dégage le son et par ce que je vois. Dans nos textes, on essaye de faire réfléchir les gens pour qu’ils s’intéressent plus aux problèmes de leurs voisins plutôt qu’aux valeurs matérielles, afin de les rendre plus humains, moins nombrilistes. On n’essaye pas d’être mystiques ou quoique se soit. Notre inspiration est la réalité, la vie au quotidien, mais on évite au maximum les clichés. On parle des temps qui changent et de l’effet qu’ont l’environnement, l’argent et la télé sur les gens. On évite de se comporter en prof et de donner des conseils. On dit ce qu’on a à dire. Après, c’est à l’auditeur de se constituer sa propre opinion. L’ensemble est souvent gris comme le béton et le ciel avec lesquels on évolue. On peut nous comparer aux peintres impressionnistes qui peignaient ce qui était en face d’eux, en transmettant l’émotion qu’ils dégageaient de cette vision.

DWT : Pour conclure, avez-vous un truc en particulier à rajouter ?
Les 10’ : Quand les gens seront reconnaître le bon, le vrai peura, celui que les institutions ne laissent pas passer, alors tous les petits groupes qui taffent dans le bon sens seront récompensés. Ne lâchons pas l’affaire. Aux states, il y a une quinzaine de maxi qui sortent par semaine. J’espère qu’un jour, ce sera le cas ici aussi. Dédicace à toutes les cités de Boboche, le centre : Karl, Paul, Ch’minv et Salv, l’Abreu et tous les quartiers de la banlieue parisienne et de province. C’est pareil partout.

Propos recueillis en 1997 par Nobel – Photos par © Alain Garnier

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